Carnet de bord 2006
1ère partie, de Marmaris à Istanbul
Du 4 au 27 mai MARMARIS YACHT MARINE :
« À deux doigts de partir… !»
Un voyage tout confort, malgré quelques angoisses quant au poids de nos bagages toujours excédentaires d’une trentaine de kilos… à 8 Euros le kilo !!! Jacky nous a gentiment déposés à Roissy et Cécile de « Nokta » a organisé notre accueil à 2 heures du matin à l’aéroport de Bodrum par un minibus que nous avons partagé avec l’équipage français d’ « Alliance ». Il est 7 heures du matin lorsque nous retrouvons Logos, un peu poussiéreux de son long hivernage mais prêt à être mis à l’eau pour son lent réveil, Pierre ayant judicieusement préparé son anti-fouling en septembre.
Ponton « Juliet », une longue remise en état de l’intérieur de Logos commence. Certes les planchers ont repris un petit coup de jeune grâce au vernis passé par Jeff, mais le tank à eau de la cabine arrière, inutilisable pour cause de fuite est resté en l’état… Les dimensions du nouveau tank ayant été augmentées, nous sommes très inquiets pour le passage de porte et de descente. Pierre décuple ses forces, je l’assiste du mieux que je peux. Ouf ! Ça passe ! Je croise les doigts pour la connexion du circuit d’eau… 200 litres d’eau dans le réservoir et un peu d’eau dans la cale nous font craindre une fuite… Re Ouf ! L’eau n’était que résiduelle. C’est tout bon.
9 heures du matin. On toque au bateau ! C’est Nazli l’operating (ue) manager de la Marina (à droite sur la photo) et sa collaboratrice qui offrent une rose à chaque femme pour la fête des mères internationale (date différente de France). Que d’attentions !!!
Séquence bouteille de plongée dans la marina: Pierre a laissé échapper une pièce d’inox destinée à solidariser bimini et portique des panneaux solaires… Lucky boy, elle n’avait pas eu le temps de s’enfoncer dans la vase… à 24 mètres, pas question d’apnée !!!
Contre 30 euros, nous troquons notre cuisinière un peu défraîchie contre le même modèle en parfait état, mais qui avait cessé de plaire sur un voilier voisin. Sitôt dit, sitôt fait… personne ne semble avoir récupéré la nôtre !!!
Logos est gréé, prêt au départ… un dernier check… et voilà l’anémomètre qui refuse de fonctionner. Certes il avait donné quelques signes de faiblesse l’an passé mais de là à ne plus réagir aux caprices d’Éole… difficile de s’en passer… surtout pour moi qui surveille avec beaucoup d’attention son écran. Commande passée à NKE Hennebont (Bretagne), livraison en Grèce, à Rhodes, communauté européenne oblige !
Nous voici donc partis pour Rhodes pour prendre possession de l’anémomètre livré chez Yann, relais Nokta. « Mandraki Marina » qui n’a de marina que les trois postes eau-électricité installés sur le petit quai et qui justifient donc d’une taxation de 8 euros par jour. Pas de pendilles installées, sans doute à la demande du plongeur « officiel… » qui se fait un plaisir, pour 100 euros, d’aller libérer les ancres malencontreusement prises dans une chaîne mère destinée à quelques pendilles d’une base de location de voiliers !!! C’est ainsi qu’en deux jours 3 voiliers devront payer leur tribu… lucratif et bien organisé si l’on en juge par la camionnette qui, dès le matin, à l’heure où les voiliers lèvent l’ancre, maraude sur le quai avec à son bord « Madame j’empoche » et « Monsieur je plonge ». Nous échapperons à la chaîne mère, mais pas à la chaîne du voilier grec de la base de location qui, sciemment, a tendu tout son mouillage en passant sur celui des voiliers touristes… Décidemment une arnaque bien organisée mais pas toujours suivie d’effet puisque Pierre et d’autres voileux se mettront à l’eau pour se libérer.
Si les autorités portuaires semblent avoir fait beaucoup d’efforts quant à l’accueil, il est dommage que de telles pratiques ne permettent pas de profiter sereinement du charme de la ville de Rhodes et de son passé prestigieux.
L’anémomètre livré, nous sommes impatients de quitter ce port et envisageons l’installation de l’appareil en des lieux plus hospitaliers… Symi peut-être. Un près serré nous conduit à « Serçe Limani », à l’entrée de la baie de Marmaris. Pas le temps de tirer des bords. « Captain Némo » coiffé d’un beau chapeau de cow-boy nous amarre à une bouée. Nous sommes le 21 mai, les « vacances » des retraités commenceraient-elles dans ce cadre si pittoresque et paisible ?
Surtout ne jamais trop parler… À peine installés, il nous faut repartir en catastrophe à Marmaris, la perceuse armée de sa grosse mèche de 13, préparée pour l’installation de l’anémomètre en tête de mât, prise de vertige pendant son ascension est attirée par le vide… 2 doigts emportés par la mèche au moment de la tentative de réception, du sang sur le pont… Une infirmière de fortune pour la chirurgie indispensable, la pose des strips d’urgence et le bandage, suivi d’une bonne dose d’antibiotiques. Cap sur Yacht Marine au cas où des soins plus pointus seraient nécessaires. Il est 9 heures du soir lorsque l’équipe de la marina nous aide à apponter à Fox Trot pour raison de meilleure connexion Internet – Quitte à être immobilisés, autant pouvoir communiquer aisément.
Pas de visite à l’hôpital, Pierre se contentera des soins quotidiens d’une gentille infirmière suisse, Claudia, du voilier « Ninfea », qui, délaissant un temps ses travaux de vernis, surveillera l’évolution des plaies avec beaucoup de gentillesse et de dévouement.
Mais, bien sûr, pas question pour Pierre, invalidé, de grimper en haut du mât. C’est donc Jeff et Esat qui se chargeront de l’installation : 2 mèches cassées, nouvelle chute de la perceuse qui, cette fois-ci, reste accrochée par son fil à la première barre de flèche… une nouvelle frayeur et maintenant, après câblage et branchement électrique effectué par Pierre, un anémomètre qui s’affiche très lisiblement en numérique.
Une fois de plus nous avons pu apprécier l’ambiance de Yacht Marine, la gentillesse et l’efficacité des gens rencontrés, familiers ou nouveaux :
Nazli, operating manager de la marina et ses collègues.
L’équipe Nokta devenue presque incontournable.
« Freedom » et le sourire de Sabine, « Lucky Jo », l’éternel amoureux en partance pour la France, « Phryné », notre compagne de voyage en Italie, dont le réveil aura été de courte durée, Claude ayant été rapatrié en avion sanitaire pour cause de sciatique, « Mélodie III » avec à son bord Roger et Mady, si riches en expériences vécues qu’ils peuvent maintenant se contenter des plaisirs des mouillages de la Côte Turquoise et, bien sûr, « Ninfea » dont nous ne connaîtrons que le sympathique équipage suisse composé de Claudia et Henry.
L’animation de Marmaris nous séduit toujours autant, sans oublier évidemment la visite à Nourredine, notre Monsieur Cuir ! Les touristes nous semblent encore assez peu nombreux, mais les commerçants ne se plaignent pas. Le petit marché nous fournit en « fraîcheurs » et de beaux pieds de basilic viennent prendre place dans notre pot riviera pour nos futures salades, en attendant la menthe avec racines, encore absente des étals.
Malgré quelques inquiétudes de Claudia quant à la difficulté des manœuvres de voile, Pierre a décidé de poursuivre sa cicatrisation en mer. Nous partirons demain.
27 mai 2006 de MARMARIS-YACHT MARINE À SERÇE LIMANI
« Coucou, nous revoilà ! »
Un déhalage peu discret, « Facétieuse » notre annexe, reste attachée au ponton, accrochée dans une pendille, freinant Logos dans son avancée et déviant sa trajectoire… Inquiétude de nos voisins qui, depuis leur arrivée en marina, avaient collectionné les angoisses, intervention du tender de la marina pour nous dégager, toute utilisation du moteur étant prohibée par les cordages des pendilles voisines… un départ peu glorieux.
Logos s’éloigne maintenant, nous l’espérons cette fois ci, pour la croisière prévue.
Une heure de voile, histoire de vérifier si, bien protégés par deux doigtiers de peau prélevés sur un gant, les doigts meurtris peuvent participer à la manœuvre.
C’est avec un grand sourire qu’Hasan, toujours en veille dans sa barque, nous accueille pour la seconde fois. Cette fois ci nous aurons droit aux calamars grillés et à la casserole, arrosés d’un bon raki.
28 mai 2006 SERÇE LIMANI
« Premiers oursins !»
Qu’il est doux ce dimanche matin dans ce mouillage que nous apprécions pour son pittoresque et la vie qui y règne. Outre les bruits familiers des femmes des pêcheurs qui tapent sur les filets pour les débarrasser des concrétions, les pétarades des moteurs des barques en mouvement, les clarines des chèvres et des vaches qui longent la berge, un petit air d’accordéon se fait entendre sur un voilier voisin… Dimanche, jour faste pour Captain Nemo car les flottilles de location font leur première escale dans cette baie ou dans la voisine.
Le thermomètre eau de mer n’affiche encore que 22°C mais il me faut m’enhardir et aller chercher nos premiers oursins, mon pêcheur favori devant se contenter d’une petite trempette, deux doigts en l’air !!!
7 heures. Nous sommes les seuls à quitter ce petit paradis dont le silence n’est troublé que par le moteur de barcasses et quelques bêlements de chèvres. En route pour une longue remontée de 160 milles. Il nous faut profiter de l’absence de l’habituel vent du Nord et bénéficier d’un vent Sud Ouest. Avec un peu de chance, nous serons gentiment poussés vers le Nord ! En fait, il ne s’agissait que d’une douce espérance de la moussaillonne, qui, jusqu’à ce jour ignorait que l’on peut se retrouver, remontant vers le nord, au prés serré par vent du Sud, que les couloirs entre îles grecques et côtes turques ne peuvent générer que confusion et animosité pour finir enfin par le vent arrière espéré avec génois tangonné… Ne pas oublier que le maître à bord est sensé être en convalescence de la main droite et semble prendre un malin plaisir à multiplier les manœuvres de voiles !!!
Notre premier coucher de soleil en mer, toujours ce moment magique où cette boule de feu disparaît à l’horizon. Première nuit étoilée mais peu éclairée par un croissant de lune qui disparaît rapidement derrière l’île de Samos.
27 heures de navigation, 5 heures de voile, une trempette au large de Kalymnos pour nous rafraîchir un peu… 23.4°C.
10 heures, nous retrouvons avec plaisir le port de Çesme qui a été notre premier contact avec la Turquie en 2003. « Trésigny » que nous avions croisé plus de deux semaines auparavant à Rhodes est déjà apponté, lui aussi en route pour le Nord. La marina qui semblait en travaux et promettait des infrastructures sérieuses a peu évolué et semble désertée par les navigateurs... Prix élevé par rapport aux prestations !!! Concurrence de la marina Setur voisine, dont le prix est justifié par le luxe et l’environnement.
Une bonne nuit pour récupérer et notre premier appel du muezzin.
31 mai 2006 ÇESME
« Belle mise en jambes !»
Un vent un peu nerveux dès le petit déjeuner freine un peu mon ardeur. Et si nous remettions notre départ à demain et commencions notre saison culturelle par cette belle forteresse génoise ignorée à notre précédent passage, avides de découvrir les hauts lieux de Turquie ?
Une belle œuvre d’art du XIVe, en pierre ocre, qui s’accroche à la colline pour dominer le port et, pour nous, un bon parcours de santé en gravissant ses nombreuses marches.
Appontement musclé de deux voiliers… le vent n’a pas faibli, mais une accalmie est prévue pour demain.
1er juin 2006 de ÇESME À ESKI FOÇA
« Plus vite que le vent !»
8 heures, pas un souffle d’air. Le plein de gasoil est rapidement fait. Une belle journée semble s’annoncer.Légère brise arrière, Pierre déploie vite « sa » belle toile, le grand spi rouge, noir et jaune. (moi je la trouve aussi belle mais fragile et nécessitant une attention de tout instant… pas question de tricot ou de Sudoku !!!). Après le génois tangonné il ne lui manquait plus que cela pour sa rééducation. 5 heures de navigation sous Spi ! Du presque jamais vu. Une traversée aisée du Golfe d’Izmir. Cette belle étape de 40 milles nous mène dans la rade d’Eski Foça , site de l’antique Foça, d’où sont parmi les Phocéens, grands navigateurs du 7e siècle av.JC, qui, sur leurs galères de 50 rameurs, sont venus au pied du Rhône établir un comptoir et fonder ainsi Marseille, la cité Phocéenne.
Un petit château restauré, de nombreux chalutiers et petits voiliers locaux, il nous reste peu de place pour apponter à côté de « Communiqué » dont l’équipage semblait fort peu disposé à la communication et au partage d’un appontement dont il espérait bénéficier pour lui tout seul. Pour une fois, je me suis réjouie de ne pas avoir étudié l’allemand, préférant ne pas avoir compris les noms d’oiseaux dont m’a qualifiée la « gretchen »… mais le ton y était !!! Ce genre de rencontre est assez rare, dernière expérience en 2002 en Croatie !!!
Un très bon accueil des autorités. Nous serons bien gardés, sous le nez de la police et de l’armée, mitraillette au flanc !!! Et ce, seulement pour 12 euros, eau et électricité comprises et avec le sourire en prime.
Une agréable promenade en bord de mer et un petit salut au phoque de pierre, symbole de la ville de Foça (Foça = phoque, Eski = vieux… la Turquie est bien le seul pays où être vieux c’est être « eski » !!!).
2 juin 2006 de FOÇA À LESBOS (MYTILÈNE)
« No comprendo !»
Cieux et vent sont prometteurs d’une belle navigation. Nous allons poursuivre notre remontée Nord vers ce petit lagoon tant vanté par François, de Nokta. Nous quittons sans regret notre voisin peu communicatif… manque de chance, notre ancre a accroché deux câbles (toujours les surprises des petits ports de pêche, mais ici pas de truandage, juste les aléas de l’aventure). Quelques manœuvres en prenant garde aux chalutiers à couple… nous voici libres et seuls pour une navigation de 20 milles. Spi, génois, spi… tout va bien lorsque tout à coup le ciel s’assombrit et le vent forcit… L’Eden espéré se révèle être aujourd’hui peu sûr et inconfortable par ce vent du Sud. Nous allons nous réfugier chez les Grecs… Lesbos est proche. Des échos plus favorables que par le passé (influence des Jeux Olympiques, fuite des navigateurs vers la Turquie…) nous donnent le courage d’affronter leurs autorités maritimes.
Vent ¾ arrière… entrée dans la vaste rade de Mytilène aussitôt repérés par un cerbère excité qui s’époumone en criant en anglais : « D’où venez-vous ? »… tiens rien n’aurait changé ?… Il est à pied et le port est grand. Pierre lui montre notre pavillon français en criant très fort avec son bel accent : « We are in Europe !!! Shut up ! » Prenons d’abord notre appontement, nous aviserons ensuite. Et puis j’ai décidé, en Grèce, de ne plus comprendre l’anglais, surtout celui des autorités… pas facile au début de faire l’idiote, mais on s’y fait !!! Et, dans ce domaine, l’accent redoutable de Pierre est beaucoup plus dissuasif.. et efficace.
Effectivement notre visite aux autorités se passe sans problème. Nous sommes accueillis par une charmante jeune femme plus préoccupée par le programme qu’elle regardait à la télévision que par nos étapes maritimes… du moment qu’elle appose le tampon d’entrée à Lesbos sur notre transit log… Une bonne fonctionnaire ! Il est 17h30.
Depuis Logos, nous jouissons d’une très belle vue sur les élégantes demeures colorées qui borde le port. Nous sommes assez peu éloignés d’un café, rendez-vous de la jeunesse motorisée 2 roues, mais l’ambiance est sympathique.Demai
n nous partirons à la découverte de l’île en voiture de location.
3 juin 2006 MYTILÈNE EX LESBOS
« Des géants pétrifiés ! »
Notre Fiat Punto nous attend devant chez Avis. Tout confort et même derniers perfectionnements puisque nous expérimenterons le rappel à l’ordre par un bip sonore pour ceinture de sécurité non bouclée, le tout pour 35 euros tout compris.
297 kilomètres de spectacle parmi les champs d’oliviers et la pinède. De rares villages aux maisons blotties les unes contre les autres dont tous les toits de tuiles semblent neufs (pourquoi ?). De très belles échappées sur le Golfe de Géras et sur la mer. Une route très vallonnée, avec le Mont Olymbos culminant à 967 mètres, puis, en direction de l’ouest de l’île, la traversée d’une zone quasi désertique menant au secteur de la « Forêt pétrifiée » 20000 années en arrière. Nous découvrons des géants debout ou abattus, fossilisés pour l’éternité : 20 mètres de hauteur, 3 mètres de diamètre. D’anciens séquoias, des pins, mais aussi des feuillus. La colère d’un volcan, une pluie de cendres… des vies anéanties, comme à Saint Pierre en Martinique, mais, alors, il s’agissait de dinosaures, de tigres à dents de sabre… et d’une vaste et dense forêt.
Beauté des couleurs allant du gris argenté au vert et au rouge éclatant.
Un site un peu magique qui sollicite l’imaginaire et génère le respect. Bien sûr, un tout petit bout d’arbre pétrifié se cache dans notre sac… en souvenir !!!
La visite du musée hébergé par le petit port voisin, Sigri, nous éclaire sur la formation de cette forêt pétrifiée et les paysages antérieurs à l’éruption. Une très riche collection de pierres aux très belles couleurs y est présentée.
C’est auprès des barques de pêche que nous pique niquons. Trois voiliers se balancent au mouillage, protégés par l’îlot de Megalonissi… image carte postale aujourd’hui alors que le vent a parait-il soufflé force 8 la veille dans le Nord de l’île. Nous apprendrons que, tout comme nous en avons fait la triste expérience à Amorgos, ce mouillage peu profond a pu se révéler dangereux par un grand vent soulevant la mer.
Au Nord Ouest, le port de Molyvos, un petit port d’opérette fréquenté par les bateaux de touristes, surmonté par un antique « Kastro » moyenâgeux d’où descendent de vieilles maisons qui finissent en se mirant dans l’eau. Encore une fois c’est plus le domaine des chalutiers et barques de pêcheurs que celui des plaisanciers. Nous nous réjouissons de ne pas y avoir mené Logos, quatre voiliers y ayant déjà, tant bien que mal, trouvé refuge.
Au passage, une visite au monastère de Taxiarchis (patron de l’île), important lieu de pèlerinage pour son icône de Saint Michel, dite miraculeuse (elle doit l’être si nous en jugeons par le nombre de colliers, bracelets, bagues en or exposés dans les vitrines en remerciement). Façonnée dans de la terre mêlée au sang de moines massacrés par des pirates en 1850 par le seul moine survivant, elle ne laisse pas indifférent.
Un petit détour Sud par Agiassos, ville en dehors des circuits touristiques, mais vantée par le Routard pour son caractère authentique. Effectivement pour nous une bourgade très attachante, pleine d’une vraie vie, désuète mais animée par des habitants qui l’aiment et en prennent soin. De vieilles maisons de pierre aux façades peintes en multicolore, des ruelles de galets où les gens ont plaisir à s’attarder pour communiquer avec leur voisin. Nous y ferons notre avitaillement en cerises, primeurs et pâtisseries (de délicieux croquets presque dignes de ceux de Geneviève).
Visite de la Cathédrale de la Panagia dédiée à la Vierge rapportée de Jérusalem en 8O3: « Agia Sion »
4 juin 2006 MYTILÈNE
« Provision d’Ouzo et une menthe de Lesbos ! »
Les cloches de «Therapodos » sonnent joyeusement, la ville semble endormie sans cette circulation intense des jours de semaine. Un roulement de tambour… C’est la parade de la relève de la garde militaire.
Promenade en ville et quelques achats de nécessité dans la rue Ermou renommée pour ses commerces. Pas de tentations de dépenses vestimentaires, tout est fermé, mais chez un fleuriste, un beau plant de menthe, espéré depuis longtemps et une petite fleur. Un commerçant affiche une réclame d’Ouzo avec en prime un joli vert gravé d’un hippocampe… difficile de résister à la tentation… nous en prendrons 2 bouteilles pour avoir chacun notre verre !!
Un petit détour par l’église dont les cloches nous ont réveillés… très aérée, joliment décorée… pas très orthodoxe.
Sapho, poétesse grecque du 7e siècle av J.C. avait, dans cette île prisée pour ses sources thermales et sa douceur, créé une école de poésie et de danses pour jeunes filles. Nous regretterons de ne pas être poètes pour chanter la beauté de cette île digne des îles du Dodécanèse que nous affectionnons.
5 juin2006 de LESBOS À BOZCAADA
« La paix revenue ! »
Une météo favorable à notre montée : un vent du Sud inhabituel à cette époque. Nous confirmons notre départ aux autorités portuaires : 8 tampons, 22,88 €… Il est 9 heures. Logos met le cap sur le Nord-Est… Jusqu’où irons-nous ? Canakkale est à 87 milles, peut-être un peu loin, mais nous pouvons faire une pause dans une petite île anciennement exclusivement militaire sous l’embouchure du détroit des Dardanelles.
Le vent tient ses promesses et nous propulse jusqu’à Bozcaada, située à 60 milles, grand largue puis bon plein… du confort avec, à l’arrivée, après 10 heures de navigation, la surprise de l’accueil. L’île militaire, objet de discorde entre grecs et turcs, devenue turque après la répartition, n’a maintenant de militaire que le renom et c’est à un beau quai tout neuf, équipé de pendilles, accueillis par d’attentionnés jeunes gens que nous appontons Logos. Agréable soirée, visite au petit port de pêche entouré de coquets restaurants et notre première Gozléme, c'est-à-dire grande crêpe fine fourrée de fromage et herbes. Les hautes murailles d’une ancienne forteresse génoise restaurée rappellent la position stratégique de cette île depuis l’antiquité. C’est de là que partirent les Grecs pour attaquer Troie. C’est là que l’empereur Justinien faisait acheminer les céréales destinées à l’approvisionnement de Constantinople.
Dans quelques années, Bozcaada sera une belle station balnéaire turco grecque.
6 Juin 2006 de BOZCAADA À CANAKKALE
« Passant, arrête-toi ! »
Très beau petit matin. « Isis », bateau français de Yacht Marine, dont nous avons rencontré l’équipage hier soir, s’éloigne sur Lesbos… de retour d’Istanbul !!!
Le vent s’est levé, mais nous allons malgré tout tenter la remontée du détroit des Dardanelles jusqu’au tiers du parcours, soit 27 milles, tout d’abord vent debout, puis avec une légère orientation ouest. Perkins et un petit contre courant favorable facilitent notre progression.
Pas encore de cargos en vue, nous sommes seuls.
Un dernier cap se finissant en langue de sable à passer, en surveillant le sondeur. À tribord toute, nous entrons dans le célèbre détroit des Dardanelles, étroite voie de passage (65 Kms de long, de 1.3 à 8 Km de large) entre l’Europe et l’Asie, enjeu commercial et militaire : Troie, Alexandre le Grand, les Romains, les Byzantins et ce massacre de 200 000 vies en 1915 évoqué par ce gigantesque mausolée commémoratif sur la rive gauche.
Deux rails pour les cargos, l’un montant, l’autre descendant et, pour certains, la montée à bord de pilotes acheminés par des pilotines.
Pour nous commence une savante navigation « électronique », Pierre devant l’écran de l’ordi, moi au pilote : +1, - 1, +10, à la recherche des contre courants le long de la rive droite, tout en évitant les hauts fonds.
C’est ainsi que, malgré un vent et un courant contraires, nous avons réussi à progresser, assez inquiets tout de même lorsque, moteur poussé, notre vitesse était réduite à deux nœuds.
Avec soulagement, nous avons aperçu les premières maisons de Canakkale. Nous n’aurons pas à faire marche arrière. Il est 15 heures. Barre à tribord, entrée dans la « marina » municipale offrant une dizaine de place pour accueillir les bateaux de passage… moyennant 25 Euros par jour. Le vent a encore forci et notre appontement est rendu périlleux par la mauvaise volonté d’un voilier américain dont l’annexe bouche l’accès de la seule place disponible… et dont le propriétaire doit être violenté pour se résoudre à bouger cette dernière. Une telle conduite est assez rare parmi les plaisanciers… heureusement. Nous en apprécions d’autant plus la gentillesse de nos autres voisins Neo-Zelandais.
En face de Canakkale, la trop célèbre presqu’île de Gélibolu : 18 Mars 1915 gravé à flanc de colline et la mention « DUR YOLKU… » (Passant, arrête-toi !) demandée par Atatürk en souvenir de toutes ces vies inutilement sacrifiées que ce soient celles des soldats des forces alliées (franco- britanniques) ou des soldats turcs.
Nous apprécions l’animation de Canakkale, accrue par les mouvements des ferries reliant rive européenne à rive asiatique. Ambiance bord de mer, mais aussi petite ville active.Un énorme cheval de bois dressé sur la promenade rappelle la prise de Troie par les Grecs et la légende d’Homère. Nous prendrons un dolmus demain pour nous replonger dans l’Histoire.
Nous finissons notre soirée au pied de la citadelle « Kalei Sultaniyye » construite sur l’ordre de Mehmet II dit le Conquérant, et transformée en musée de la Marine. Canons, bombes pendulaires et une maquette grandeur nature du Nusrat, le trop célèbre mouilleur de mines qui a ainsi coulé 4 navires ennemis en 1915, « ornent » un agréable jardin. Un énorme camion commémorant en photographies les hauts faits d’Atatürk a pris place sur la promenade, nous satisfaisons au rite… et faisons la visite.
Nos « indélicats » voisins de ponton affichent un calicot « Black Sea Rally 2006 » N°104. Nous apprendrons ultérieurement que l’officiel rallye de la mer Noire a été supprimé pour cause d’indélicatesse des autorités portuaires russes et qu’il ne s’agissait que d’une initiative privée de 4 voiliers américains assez prétentieux…
7 juin 2006 CANAKKALE
« Il fallait que Pâris ait beaucoup de charmes... ! »
Il ne reste, ce matin, que deux voiliers dans la marina, Logos et un voilier britannique qui a dû renoncer à la montée sur Istanbul tant les conditions étaient mauvaises… Il est certain qu’hier ce n’était pas très favorable !
Le plein de gasoil est fait… on a beau marcher à la « voile »… il faut toujours être prévoyants !!! et la consommation a été sérieuse : 4,5l/h au lieu des 3 habituels.
Un bon kilomètre à pied, une petite gare routière sous un pont, nous voici assis en route pour Troie : 30Km, 1,5€ (nous sommes toujours agréablement surpris des prix des déplacements en Turquie). Un seul autre touriste anglais, un backpacker, assez peu communicatif !!! C’est avec plaisir que nous retrouvons la Turquie agricole, celle des champs, des petits villages.
De l’antique cité de Troie il ne reste aujourd’hui que des ruines et il nous est difficile d’y imaginer la vie de la Belle Hélène et de Pâris à la cour du Roi Priam… Il est sûr qu’il faut déplorer le passage au 19e siècle du peu délicat archéologue allemand Heinrich Schliemann, qui, pour découvrir le trésor du roi Priam à des fins d’enrichissement personnel, détériora le site et s’empara d’objets de valeurs dont certains peuvent aujourd’hui être admirés … à Berlin ! Les fouilles effectuées maintenant avec soin révèlent que 9 civilisations ont successivement occupé ce site, se construisant les unes au dessus des autres depuis 3.000 ans av. JC. Quelques hautes murailles, un théâtre, un bouleutérion… un petit musée archéologique présentant de beaux sarcophages, quelques statuettes et bien sûr le légendaire cheval de bois qui abusa avec tant de facilité les Troyens., dans lequel il est possible de prendre place tout comme l’ont fait Ulysse, Achille, Ajax et nombre de guerriers grecs trompant ainsi les troyens. Agréable pèlerinage à la mémoire d’Homère et des classiques qui ont enchanté notre jeunesse en nous faisant rêver.
À l’entrée du site, un arbre attire les visiteurs gourmands… par ses fruits blancs. Nous découvrons que le mûrier dont les feuilles font le régal des vers à soie, peut aussi donner de délicieux fruits, un peu semblables à des framboises, et bien sûr nous nous joignons aux amateurs qui se font un honneur de nous en cueillir.
Un « Truva Kebab » ( sorte de tourte fourrée de riz, viande, courgettes et herbes) avant de reprendre le dolmus, sans avoir cédé au charmant sourire d’une jeune fille vendant de petits chevaux miniature qu’elle fabrique parait-il elle-même…
À Canakkale, de nombreux marchands ambulants facilitent notre approvisionnement en fruits. Une très belle soirée… même si le vent souffle dans les haubans… Demain est un autre jour…
8 juin 2006 de Canakkale à Lapseki
« Jusqu’où irons-nous ? »
En Turquie, pas la peine de se soucier pour le réveil, le muezzin s’en charge… Appels dès 5 heures du matin, un coup d’œil à l’extérieur… pas un souffle d’air. C’est le moment !Il va falloir composer avec le vent qui va inévitablement se lever et avec le courant. Logos, avec l’aide de Pierre, joue avec les contre-courants et maintient ses 6 N, tandis que ses passagers peuvent admirer le paysage : cultures sur la rive droite, forêt dense sur la presqu’île, le ballet des oiseaux à la surface de l’eau et les cargos aux silhouettes majestueuses. Trois dauphins croisent notre route.
Peu à peu le vent s’établit…15 N, 20 N. Tout est encore jouable et nous passons Lapséki, petit port recommandé par François de Nokta pour une halte.Perkins accélère son régime, mais le ciel s’assombrit, Meltem grossit : 25N, 30N, la mer s’enfle, devient très inconfortable et il nous reste la barre la plus sérieuse à franchir avant de pénétrer dans la mer de Marmara. Demi tour, nous irons faire une pause à Lapséki. Nous avions parcouru 25 milles, il en restait encore 37 avant de pouvoir nous ancrer.
En dehors du port principal qui accueille les nombreux ferries, un tout petit port, loin de tout, quasiment vide où nous pouvons jeter l’ancre et 70 mètres de chaîne pour opposer une force d’inertie à Meltem qui semble décidé à s’énerver. Il commence à pleuvoir… un orage éclate… ouf nous sommes à l’abri.
La grand’ route borde le port, cette même route que nous avons empruntée il y a 3 ans pour rejoindre Istanbul en car depuis Marmaris mais elle ne nous cause aucune gêne.
9 juin 2006 LAPSEKI
« Que d’eau ! Que d’eau ! »
Coq et muezzin rivalisent pour nous réveiller. Pouvons nous reprendre notre route ? Sans doute pas aujourd’hui tant les gouttes de pluie sur Logos sont denses.
Nous nous offrons une journée cool tout en écoutant tomber la pluie.
Le bulletin météo émis pour l’Egée Nord n’est pas folichon… peut-être sommes nous sous d’autres influences ?
10 juin 2006 de LAPSEKI à PORT MARMARA
« Notre 5ème mer ! »
Une nuit calme nous invite au réveil très matinal… un léger souffle venant du Sud… c’est tout bon.
Nous croisons le ferry qui relie côte européenne à côte asiatique, emprunté deux fois en car.
5h30 : une boule de feu s’élève au-dessus de la côte, spectacle toujours grandiose que nous offre le soleil.
6h30 : nous passons ce dernier cap, mais cette fois-ci, Perkins peut maintenir une vitesse de 5N, assisté par vent et courant. Nous voici dans la mer de « Marbre » qui doit son nom à cette grande île, si réputée pour la pureté du marbre qui en est extrait depuis l’Antiquité.
6h50 : nous hissons la Grand’voile pour profiter du petit souffle d’est. Notre route s’éloigne maintenant des rails des tankers et nous mène vers le sud de l’archipel de l’île de Marmara. Un peu de tourisme côtier pour apprécier la beauté de ces îles quasi désertes.
14h : appontement dans le port sud de l’île essentiellement tourné vers la pêche. Seulement trois places visiteurs parmi les chalutiers, mais un accueil chaleureux et une ambiance très naturelle.
Seule difficulté rencontrée : obtenir des renseignements quant à l’horaire du bus qui nous permettrait de visiter le nord de l’île où se trouve l’essentiel des carrières de marbre qui ont approvisionné, depuis l’Antiquité, l’Italie, la Grèce, la Turquie, contribué à l’élaboration de chefs d’œuvre et qui continuent à fournir cette roche précieuse.
Port Marmara, seulement animé par les activités de la pêche et un tourisme essentiellement turc est un lieu bien agréable avec ses restaurants de bord de mer, ses petits commerces.
Un autre bateau français vient s’ancrer, il s’agit d « Epissure » de Yacht Marine, familiers de la mer de Marmara qu’ils affectionnent pour son authenticité et l’accueil reçu dans les petits ports. La troisième place sera prise par « Otarie » voilier suisse, tout aussi adepte de cette mer qui se mérite, loin des bases de locations et des destinations recherchées par les touristes. Au cours de notre promenade, le cimetière n’a pas échappé à notre découverte. Toutes les tombes en marbre blanc… de Marmara… donne une impression d’immortalité.
11 Juin 2006 PORT MARMARA
« Nous restons de marbre ! »
Le temps est peu engageant. Les marins restent au port.
12 Juin 2006 de PORT MARMARA à SARAYLAR
« La lèpre marmoréenne ! »
Hésitation, décision. Malgré le vent de N.E déjà un peu prononcé, nous décidons d’aller nous ancrer à Saraylar au Nord de l’île et, ainsi, approcher ces si célèbres carrières de marbre.
Vent debout : 26 Nœuds dans le nez, Perkins un peu accéléré et, devant nos yeux, une très belle côte escarpée, très boisée, dont les veines de marbre se baignent dans la mer. C’est sans doute pour cela que les Anciens ont découvert la richesse de cette île. Et puis, tout à coup, la souffrance : de vastes plaies béantes creusent la montagne, l’homme dévastateur est passé par là. Toutes ces carrières abandonnées ou encore exploitées apparaissent comme une lèpre qui ronge l’île, en modifiant ses formes. Quatre minéraliers sont là, en attente. Barre à tribord ! Saraylar, port d’embarquement du marbre depuis l’Antiquité, apparaît, meurtri par les exploitations anciennes, l’activité minéralière qui y règne et la noria des camions chargeant les gros transporteurs.
Étrange endroit pour faire escale, mais tellement hors du commun. Du marbre, du marbre partout. Du jamais vu ! Une digue toute en marbre, un petit port bordé de statues de marbre , œuvres de sculpteurs modernes et un accueil chaleureux par les pêcheurs d’un chalutier apponté, eux pas de marbre !!! Deux œuvres un peu érotiques ornent le quai où nous sommes appontés.
Tandis que nous nous restaurons au petit estanco principalement destiné aux locaux, une longue et puissante vedette apponte… étrange hasard, il s’agit d’Adnan Ozturk qui avait, il y a 26 ans, accueilli Rod Heikell, l’auteur de notre guide nautique et cité par ce dernier. 26 ans après, Adnan n’a plus d’activité touristique. Il gère maintenant les importantes carrières dont il est propriétaire. Rappels de souvenirs de jeunesse, plaisir de la rencontre, rendez-vous est pris pour la visite de ses carrières dans la soirée… Inattendu !!!
En attendant, nous admirons ces œuvres qui nous ont intrigués à notre entrée dans le port, un morceau de marbre, un burin et une œuvre qui naît selon l’inspiration de l’artiste : statues, animaux, puis nous allons rendre visite à un petit musée dit de plein air où ont été retrouvées les œuvres inachevées ou manquées de sculpteurs antiques. Il ne reste en fait qu’assez peu de choses, l’accès à ce site étant libre…
Une belle Jeep 4/4 se gare à côté de Logos, nous voici embarqués dans la montagne pour la visite des carrières et de l’usine d’Adnan.
Un circuit impressionnant, dans un site digne d’un film à la « Indiana Jones ». De grandes falaises de marbre débitées peu à peu à l’aide d’imposants Caterpillars, d’énormes blocs travaillés à la scie, de l’eau recueillie par de nombreux forages, de la boue et cette haute paroi blanche, d’un marbre très pur qui sera destiné à l’exportation vers la Grèce ou l’Italie au prix de 230 € le m3.
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Que de temples, théâtres, arcs, colonnes, chapiteaux ont dû être construits avec les flancs de cette paroi voisine maintenant épuisée mais toujours propriété d’Adnan.
Notre formation sera complétée par la visite d’une usine désaffectée, site très insolite gardé par une sorte d’ermite, maintenant domaine des herbes folles. De vieux bâtiments en ruine abritent d’antiques machines, en particulier des scies animées par une machine à vapeur, de vieilles maisons de bois et un cimetière ottoman rappellent la vie qui animait ce lieu anéanti par les techniques modernes. En fait, la première usine de marbre « industrielle » créée en 1910.
C’est devant plusieurs verres de Raki pris à bord de Logos au son de la musique d’Aicha et autres, émis par le téléphone d’Adnan, puis devant un bon repas offert au restaurant que nous terminons cette soirée assez inattendue.
13 juin 2006 SARAYLAR (Marmara Adasi)
« De belles soles au menu ! »
Après la soirée d’hier, un peu de farniente s’impose. Une excellente idée puisqu’au retour du chalutier parti en mer tôt le matin, nous pouvons nous approvisionner en belles soles et crevettes. Rien que du très bon et un agréable copinage avec les marins du chalutier… Pierre cherche à se faire embaucher…
« Otarie » resté à Port Marmara nous a rejoint. Encore une rencontre très enrichissante et une belle soirée.
14 juin 2006 de SARAYLAR à ISTANBUL (Atakoy Marina)
« Au pied du Bosphore ! »
5h45 : départ pour Istanbul. Étant donné le vent, nous avons choisi de nous y rendre en une seule étape : 58 milles à parcourir.
Les flancs dévastés de la montagne commencent à s’éclairer, trois cargos sont en stand bye dont l’un pour la Syrie qui se contentera d’un marbre grisâtre, moins pur mais aussi moins cher.
Il fait encore frisquet, une vraie navigation en mer d’Iroise : 17°C, et petite laine de rigueur.
Un léger vent N.W se lève, trois quart arrière. Tout autour de nous, la Grande Grise. Nous sommes loin en effet de ce bleu encre que prend la Méditerranée en pleine mer. Les turcs appellent la Méditerranée « Akdeniz » c'est-à-dire la mer blanche, « Karadeniz » la Mer Noire… heureusement qu’ils ont choisi la mer de marbre, beaucoup plus poétique que la mer grise. Aucune réelle envie d’y faire trempette, bien qu’elle ne soit pas apparemment sale.
Quelques gros engins croisés et puis l’approche de la côte européenne, basse et très investie.
De gros tankers sont ancrés à l’entrée du Bosphore, sans doute pour réguler leur remontée vers la Mer Noire.
Atakoy Marina est en vue, une belle marina dans la proche banlieue d’Istanbul.
Vite un petit tour à Istanbul, histoire de nous replonger dans l’ambiance.
De nombreux taxis jaunes maraudent mais il nous semble tout aussi agréable d’emprunter le bus 81 qui, pour un euro chacun, nous mène à Eminonu, en plein cœur du vieil Istanbul. Les usagers des transports stanbouliotes étant munis de cartes à puce, nous sommes pris en charge par un aimable professeur retraité. Toujours agréable ces gentilles attentions. Nous longeons le terminal de ferries venant de la rive asiatique, un échange constant entre ces deux parties d’Istanbul. À cette heure, c’est un peu l’heure de pointe qui ralentit la circulation. Voici les hauts remparts de Sultanhammet! Première visite, le Bazar Egyptien, toujours aussi coloré, mais avec une petite touche « coup d’œil pour le touriste », il se fait déjà tard et de nombreuses échoppes ferment leur rideau de fer. Un rapide diner, puis une marche digestive sur le pont de Galata avec ses pêcheurs à la ligne fidèles et ses nombreux restaurants. Même mon marchand de chaussures a disparu… heureusement quelques boutiques subsistent dans le passage qui mène à Eminonu… « mes » chaussures sont là … 12 € ( tous les 3 ans… notre budget n’est pas trop grevé!).
Il fait de plus en plus froid… une vraie température d’avril… que se passe-t-il ?
15 juin 2006 ATAKOY MARINA
« Petite remise en ordre !»
Perkins a besoin d’une petite révision. Pierre a envisagé une révision du filtre à gasoil qui avait quelques pertes… assistance de deux voisins turcs, puis appel à l’homme de l’art pour purger les injecteurs.
Pour moi, grande lessive. Logos est ritalisé… je n’aime pas trop cela mais le vent me permet de ne pas déguiser Logos trop longtemps.
Un magnifique supermarché « Migros » occupera notre soirée et facilitera notre réapprovisionnement.
16 juin 2006 ATAKOY MARINA
« Sous haute surveillance! »
Au programme de cette belle journée : Istanbul et un petit tour dans tous ces lieux que nous avons pu apprécier il y a trois ans.
Le grand bazar avec ses marchandises à profusion : bijoux, cuirs, vêtements avec son secteur vieux bazar pour la bijouterie de grand luxe et les antiquaires… un très beau personnage en ivoire pour 8500 €… un peu cher.
Puis Haghia Sofia, toujours aussi belle, la Mosquée Bleue dont la visite nous est tout d’abord interdite pour cause de sortie de la prière du vendredi… impressionnant le nombre de fidèles, plusieurs milliers et le nombre de policiers en uniformes ou en civil scrutant tous les visages rencontrés. Nous y reviendrons en soirée pour en admirer l’harmonie et la richesse des céramiques et des vitraux.
Beaucoup de femmes voilées se promènent dans les jardins… des femmes d’Anatolie portant le rituel foulard, venues en touristes ? un signe de l’islamisation grandissante ???
Nous retrouvons avec plaisir le vieux quartier de Sultanhammet où nous avions logé, quartier dont les maisons de bois sont l’objet de toutes les attentions et abritent d’élégants hôtels.
17 juin 2006 d’ATAKOY MARINA à BOSTANCI en passant par le BOSPHORE
« Baignade en Mer Noire ! »
Premier appel du Muezzin. Désolé, nous sommes déjà en manœuvres prêts pour une belle croisière sur le Bosphore jusqu’à l’embouchure en Mer Noire. Il est 5 heures, tout semble encore dormir, même les immenses cargos à l’attente qui nous rappellent Portoferraio. En route pour le Bosphore (passage de la vache en souvenir de la fuite de l’infortunée Io) et une croisière de quelques 20milles sur un ruban de 500 mètres à 3 Km de large. La grande mosquée de Sultanhammet sort peu à peu de la brume du matin, Sainte Sophie, puis les hautes murailles de Topkapi. C’est assez irréel que de longer lentement cette ville magique qui s’éveille. Pas encore la grande animation, un petit détour par la Corne d’Or est donc possible… Nous sommes rappelés à l’ordre par la sirène d’un petit ferry, inquiet de nous voir nous engager en direction d’un pont sous lequel nous ne pouvions pas passer… « Sont-y inconscients ces touristes ? » Il ne sait pas bien sûr que Logos (ou plutôt son skipper) a déjà fait le coup dans le Canal Grande à Venise…!!! Un demi tour avant le Pont de Galata. Deux grands bateaux croisière sont appontés : Wind Spirit, un beau 3 mâts héritier récent du Club Med et un paquebot « Super Star Libra », leurs passagers encore endormis.
Devenu pro des contre-courants (le courant Mer Noire, Mer de Marmara étant de 4 à 5 Nœuds), Pierre propulse gentiment Logos le long de la rive européenne, Domabahce (résidence des derniers sultans et lieu de décès d’Atatürk) d’où s’éloigne une grande gondole (quelque officiel promenant sa famille tout comme au temps des sultans ?), des pêcheurs en rang serré trempent de longs fils dans l’eau (la pêche semble meilleure dans ce secteur que sur la côte sud), de magnifiques maisons de bois du 19ème, « Yalis », restaurées pour accueillir les riches stanbouliotes et les
Des châteaux fortifiés tels Rumeli Hisari et Rumeli Kavagi, évoquent l’époque où les ottomans faisaient le siège de Constantinople. Aujourd’hui le Bosphore continue d’être bien gardé et surveillé constamment par des navires, mais dans un climat bon enfant
.
Même les gros cargos souvent décrits comme inquiétants dans les guides semblent très bien régulés dans un sens ou dans l’autre, et respectent ce bel environnement. Rien d’angoissant, une belle croisière les yeux grands ouverts, les dauphins aussi, rencontrés en chemin, semblent à leur aise.
Deux grands ponts enjambent le Bosphore, reliant rive européenne et rive asiatique, dont l’un construit par des ingénieurs japonais en 1988, permettent un échange constant entre les deux rives et nous pouvons penser qu’avec la construction d’un tunnel souterrain déjà bien entamée, les ferries devront penser à se reconvertir…
Le soleil est au zénith, cette vaste avenue maritime s’évase. Des cargos sont en stand bye, prêts à descendre vers Marmara. La Mer Noire s’étend devant nous, notre 6e mer !!! Rien de très noir, plutôt du vert sombre, mais en tout cas toujours pas de bleu. Un port de pêche « Türkelifeneri », sur notre bâbord, pourrait être une escale avant d’entamer notre redescente… des chalutiers, un chantier de réparations, rien de très folichon pour apponter et surtout un temps splendide qui nous promet une descente tout aussi agréable que la montée, et cette fois-ci sous génois tout en bénéficiant du courant porteur.
Prétextant vérifier l’arbre et l’hélice, Pierre s’offre une baignade en Mer Noire, histoire de dire…
Une très belle descente, toujours le long de la rive européenne si riche en beaux sites jusqu’à Istanbul, puis traversée du Bosphore pour rejoindre, côté asiatique, Bostanci où se trouve la marina du propriétaire de Yacht Marine. Nous frôlons la tour de Léandre, cet amoureux infortuné d’une « chaste » prêtresse d’Aphrodite, obligé de rejoindre son amante la nuit à la nage à la lueur d’une lumière… Un jour, le vent ayant éteint la lumière, il se noya, et son « Hero » (nom de cette amante) aussi… de chagrin.
Nous laissons Fenerbache, autre grande marina d’Istanbul, et après quelques hésitations, nous nous engageons dans une sorte de port où sont appontés de nombreux ferries (heureusement pas en mouvement).
À bâbord, quelques vedettes, bateaux de pêche… contrôle au G.P.S… il s’agit bien de la marina dont les coordonnées nous ont été données par Nazli… mais où se placer ?… Quelques personnes s’activent sur leur bateau. Nous prononçons le sésame magique « M.Bilgin » et, tout de suite, c’est l’affairement, un bateau est déplacé, Logos est apponté le long d’une grande barge et solidement ficelé pour éviter les « malmenances » des ferries aux moteurs parfois un peu nerveux.
Il est amusant de retrouver, apponté de l’autre côté de la barge, le voilier turc « Filiz » (traduire fiston) de Monsieur Bilgin que nous avons vu en cours d'achèvement l’an passé à Yacht Marine, voilier construit dans la plus pure tradition maritime turque. Une très belle journée s’achève. Nous avons effectué 25 milles aller, 20 milles retour et nous nous retrouvons appontés dans un lieu hors du temps, en fait une sorte de coopérative pour pêcheurs et plaisanciers du dimanche. Chacun sur le ponton s’est aménagé son petit coin privatif avec table et fauteuils de jardin, sans oublier les plantations et le bureau accueil, lieu de rendez-vous des anciens devant un çai (thé). Rien à craindre pour Logos que nous envisageons de laisser quelques jours pour aller faire un petit tour vers Ankara… Il faut montrer patte blanche pour entrer et chacun est si accueillant et prêt-à-porter aide.
Il ne nous reste plus qu’à organiser notre circuit … Ankara, Trabzon ? Sur les conseils judicieux et purement amicaux de « Jan » responsable d’une agence de voyage Pégasus, il nous parait plus sage de n’envisager cette fois-ci qu’un circuit autour d’Ankara ; le Nord Est Turquie sera l’objet d’une autre visite.
19 juin 2006 BOSTANCI
« Préparatifs !»
Les sacs sont sortis et vite remplis du minimum (pour une fois diraient certains !)… peut-être devrons nous emprunter car et Dolmus ?
Pour aller à Ankara, pas de problème, la gare ferroviaire de Bostanci dessert la capitale, une vraie chance qui nous évite transbordement par bus ou taxi.
Départ 23h45 par le train couchettes Fatih Express. Arrivée Ankara 7h20… pour 30 € à deux !!! (à peu près Toulouse Marseille), du jamais vu et une nouvelle expérience.
23 heures, nous sommes sur le quai de la gare, très fréquentée en cette fin de week-end.
Voiture 9, seule voiture couchettes avec des compartiments quatre places. Deux passagers masculins sont déjà installés depuis Istanbul, soucieux de ne pas perdre leur nuit. Nous non plus ! Cela nous permettra d’être à pied d’œuvre à l’arrivée. Tout est hyper clean. Pierre a assuré la position élevée, je me niche en bas. À part le roulement du train sur les rails, aucun bruit, aucun appel dans les gares. 7h10, réveil discret d’un contrôleur. Nous voici en gare d’Ankara, sur un vaste quai de marbre d’une propreté surprenante.
Notre billet de voyage de retour en poche, nous voici prêts à découvrir Ankara, capitale de la Turquie moderne depuis le 13 octobre 1923, date à laquelle Atatürk, désireux de rompre avec le passé ottoman décida de redonner à l’Anatolie une importance à laquelle l’histoire des civilisations lui permettait de prétendre.
Comme toujours en Turquie, de nombreux taxis jaunes sont à l’arrêt … direction Ulus, vieux quartier d’Ankara, blotti au pied de la citadelle où nous pensons trouver des hôtels plus pittoresques, peut-être moins chers que ceux des quartiers modernes, et bénéficier de la proximité des ruelles et vieilles maisons.
Arrêt rue de la République « Cumhurriett », hôtel Tas (couronne), une courte discussion au sujet du tarif ramené à 80TL (40€), un tarif de grande ville mais raisonnable. Une voiture de location nous sera livrée sur place demain matin. Tout confort ! Nous pouvons poser nos bagages, nous restaurer, un petit déjeuner nous étant offert et nous rafraîchir un peu avant de partir à la découverte de la ville.
C’est vers la Citadelle que nous nous dirigeons, non sans avoir salué au passage la statue équestre d’Atatürk, omniprésent ici, à pied, à cheval, en buste, en peinture.
La montée dans les ruelles, bordées de vieilles maisons de bois, est animée par la vie qui règne dans ce vieux quartier très commerçant. Après une courte visite au marché, juste pour le plaisir des yeux, nous traversons un secteur digne du Sentier à Paris, offrant en vitrine de splendides toilettes anatoliennes pour cérémonies… des merveilles d’élégance.
En haut, sur un promontoire, se dresse l’antique citadelle, objet de nombreuses restaurations avec les matériaux trouvés sur site dont des fûts de colonnes romaines. Une porte de pierre, un escalier. Nous voici sur le chemin de ronde avec tout Ankara à nos pieds : la vieille ville avec ses maisons aux façades colorées de vert ou de bleu, blotties les unes contre les autres et, au loin, la ville nouvelle avec ses vastes avenues, ses parcs et ses hauts bâtiments. Une petite jeune fille nous fait les honneurs de « sa » citadelle, en anglais. C’est donc à elle que nous achetons un joli bracelet en remerciement.
Non loin de là, un vieux bazar restauré abrite le Musée des Civilisations Anatoliennes, heureusement ouvert le lundi en saison… ouf ! Une très belle visite qui nous entraîne non seulement dans l’histoire de l’Anatolie, mais aussi dans celle de l’humanité, au cœur de la civilisation hittite, c'est-à-dire 8000 ans avant notre ère. Que de merveilles ont été découvertes à l’est d’Ankara, dans les sites d’Attusas et Catalhöyük, révélant la grandeur de la civilisation hittite : nombreuses statuettes de la déesse mère, des bronzes dont ceux des cerfs et des disques solaires (symbole d’Ankara), de magnifiques bijoux, des bas reliefs organisés comme ils l’étaient sur le site et un nombre impressionnant de tablettes d’argile, certaines dans une enveloppe de terre, autant d’écrits permettant de retracer la vie sociale des Hittites et de constater combien leur société était avancée…
Un « Dyonisos » vient d’être récupéré chez les Anglais après que le vol eut été prouvé… une grande première… Imaginons le British Muséum restituant une partie du Parthénon, ou le Louvres rendant aux Grecs la Vénus de Milo et la Victoire de Samothrace… sans doute acquis par les Consuls et non volés ?
Pique nique ombragé dans le jardin du Musée. Nous allons pouvoir aller visiter le Musée Ethnographique, situé à l’entrée de la ville nouvelle, à côté de l’hôpital. Déception… pas de saison touristique pour ce musée fermé le lundi… Il en sera de même pour le Mausolée d’Atatürk… Nous aviserons à notre retour de circuit en voiture. Un taxi et nous voici déposés devant la gigantesque mosquée de Kocatepe qui se dresse, semblable à la Mosquée Bleue en beaucoup plus grand, sur une vaste esplanade. Vingt années nécessaires à sa construction, des dimensions énormes mais beaucoup d’élégance à l’extérieur comme à l’intérieur. Une bibliothèque et une médersa font de cet ensemble un haut lieu de l’Islam.
Un autre taxi nous dépose non loin de notre hôtel. Nous ne nous attarderons pas, heureux de retrouver la douceur d’un bon lit et déjà prêts à notre départ du lendemain.
20 juin 2006 d’ANKARA à AMASYA
« À la découverte des Hittites !»
Une antique Fiat 131, fabrication turque de plus de 30 ans, nous attend devant la porte de l’hôtel. Il est 9h15. Nous partons pour une virée de 1179 Km. Des camions, des travaux sur une très grande distance (depuis notre arrivée en Turquie, il semble que nous devions assister à tous les grands travaux routiers : Ephèse, Pamukkale, Antalya, Myra , Mersin, Antakya... et être les témoins de l’extension du réseau routier turque) … Un arrêt prolongé pour cause de dynamitage des parois rocheuses surplombant la route… mais tout cela dans une atmosphère détendue et dans un paysage de toute beauté tant par la douceur des formes que par le camaïeu des ocres, blond, beige, assez semblable à la Toscane. Des champs à perte de vue séparés par de hautes rangées de peupliers bordant un cours d’eau ; parfois un paysage de steppe où l’on aurait plaisir à voir galoper quelque guerrier mongol ; une route qui serpente entre les monts. Une bien belle région que cette Anatolie du Nord, berceau de l’humanité, si paisible aujourd’hui comme si elle avait oublié le passage de tous ces conquérants dévastateurs : Alexandre le Grand, Tamerlan…
Première halte : le domaine hittite à Hattusas. Un bond en arrière dans l’histoire, loin avant les grecs et les romains, loin devant les lyciens. 8000ans avant notre ère et déjà une civilisation très avancée comme en témoignent les nombreuses tablettes (environ un millier) recouvertes d’écriture cunéiforme (vie politique, commerciale, sociale et familiale) et les nombreuses œuvres d’art retrouvées attestant des croyances et des maîtrises de la technique de fusion des métaux : bronze, étain, cuivre.
Hattusas, une vaste cité construite sur un promontoire à l’intérieur de hauts murs de fortification, des tunnels en clé de voûte permettant les contacts avec l’extérieur, de monumentales portes fermées à l’aide de pivots de métal enfoncés dans la pierre, des réserves d’eau dans des bassins étroits pour éviter l’évaporation, un sanctuaire de plus de dix temples découverts à ce jour révélant leurs croyances (Teshub, dieu du temps, Hébat, déesse du soleil, Sharumma, leur fils) un palais, de nombreuses maisons. Nous avions réussi à échapper aux guides qui se proposaient à l’entrée du site, mais, c’est convaincus par les explications efficaces d’un autre guide, rencontré sur le terrain, sans doute beaucoup plus persuasif, que nous avons effectué la visite de ce lieu et du site voisin de la nécropole de Yazilikaya, découverte en 1834 par Charles Texier, très satisfaits de nous être enrichis de ses connaissances, non sans avoir acquis deux petits lions en serpentine, pierre verte de la région, sculptures faites main.
Alaca Höyük complétera notre rencontre hittite, site des tombes dites royales où ont été trouvés les armes et les bijoux admirés à Ankara.
Une douce soirée à Amasya, renommée pour être l’une des plus belles villes de Turquie, tant pour sa situation entre de hautes falaises, la dolence de la rivière Yisilirmak qui la traverse, que par l’élégance de son habitat. Nous poserons notre sac dans un pittoresque konak (maison ottomane), dominant le Yesilirmak (une des plus belles chambres jamais rencontrée avec salle d’eau derrière des portes de placard ouvragées, et une décoration purement ottomane).
Un vieux château au sommet de l’une des falaises, des tombes rupestres dites tombes des Rois du Royaume du Pont, un grand konak qui abrite la reconstitution d’un ancien intérieur ottoman et la visite du musée archéologique complètent nos connaissances.
Nous semblons être une fois de plus les seuls touristes étrangers et apprécions l’atmosphère paisible de cette halte purement turque.
21 juin 2006 d’AMASYA à SIVAS via TOKAT
« Circuit seljoukide ! »
Nous quittons presque à regret notre Konak apprécié tant pour l’élégance des lieux que pour la qualité de l’accueil.
Prochaine halte : TOKAT, un gros bourg seljoukide plus tourné vers le commerce que vers le tourisme. Les vieilles maisons ottomanes n’ont pas eu droit au ravalement qui redonne fraîcheur aux dames âgées, et certaines donnent d’évidents signes de faiblesse, mais l’atmosphère de cette ville est plaisante : animation, accueil (combien de fois avons-nous dû refuser un thé).
SIVAS, ville importante sur le route vers l’est, centre d’échanges, de commerce fidèle à son passé dont subsistent quelques vieilles maisons et de beaux monuments, regroupés dans un vaste parc, monuments que l’on aimerait voir revivre pour témoigner de leur richesse d’antan. 1271, année de gloire avec la construction de magnifiques monuments, à la demande du Sultan Izzedin : Sifaiye medresesi dont il ne reste qu’une porte, Cifte medersa transformée en lieu de détente et bazar et Gök Medrese, qui attend en vain les liras qui permettraient sa réhabilitation… Quelques travaux autour permettent d’espérer. 3 verres offerts par les pompistes dont celui du club de foot de Galatasaray, 6 soucoupes et six petites cuillères à thé en bel inox ont pris place dans nos bagages.
22 juin 2006 de SIVAS à ANKARA.
« Atatürk de loin !»
Une circulation fluide, contrairement à celle que nous avions rencontrée à l’aller. Toujours ces paysages pleins de charmes qui raviraient un peintre pour leurs couleurs. Des scènes champêtres, c’est la saison des moissons. Soucieux de ne pas affronter en voiture l’agitation routière d’Ankara, nous garons notre Fiat devant la gare (après avoir surmonté la difficulté de retrouver cette dernière… difficile de se faire comprendre en des lieux où seul le turc est parlé).
Une visite au mausolée d’Atatürk qui se dresse tel l’Acropole au milieu d’un vaste parc… pas le droit d’approcher… fermeture à 17 heures. Il ne nous reste plus qu’à contourner le parc pour saluer de loin Le Grand Homme.
Dîner romantique au bord de la piscine du restaurant de la gare… un très beau cadre et une addition raisonnable compte tenu du Raki et de la piscine.
21h30 nous restituons notre Fiat.
23h30 : le Fatih Express est formé, il ne nous reste plus qu’à nous installer pour la nuit.
23 juin 2006 d’ANKARA à BOSTANCI
« Confort du wagon lit! »
Le contrôleur a frappé sur la porte du notre compartiment en annonçant « Bostanci »… Déjà ! il n’est que 6h50 et l’arrivée est prévue à 7h53… heureusement, car ayant confondu l’heure d’émission du billet de retour avec celle d’arrivée, nous en aurions été quittes pour aller jusqu’à Istanbul pour reprendre le ferry pour Bostanci.
7h10 Nous débarquons à la « marina » : « Dikkat köpek var » (attention au chien) !!! Le chien est déjà à la niche, et nous retrouvons notre Logos, bien sage pendant notre absence. « Problem yoke ». Seul notre tamagoshi n’a pas supporté notre absence et aucune pulvérisation ne réussira à redonner vie au Tillandsia… Deux expériences, deux échecs ! Pas fait pour nous !!!…
Pierre passe au labo photos, je range, je lavote. Les ferries continuent à nous gigoter, mais sans mal.
24 juin 2006 BOSTANCI
« Ambiance à Bostanci ! »
Un projet avorté pour absence de navette… aller revoir le musée archéologique d’Istanbul avec un œil neuf maintenant que nous connaissons les sites d’où ont été soustraites un grand nombre des richesses exposées. Une journée au calme qui n’est pas pour me déplaire. Une seule obligation, regarnir le frigo de fraîcheurs (pas trop difficile, Bostanci signifie le potager, et le petit passage voisin regorge de légumes et de fruits) et préparer l’accueil à l’apéritif de Jon et son ami Kerim qui nous ont témoigné beaucoup de gentillesse. Une belle soirée animée, deux de leurs amis étant venus se joindre à nous… de joyeux supporters de clubs de foot opposés. Can a accepté de devenir « Relais Nokta » à Istanbul, une bonne recrue pour l’association.
Kerim nous ayant apporté pour notre dîner deux beaux coquillages, genre lambis et une bouteille de Raki, nous prolongeons cette soirée en amoureux.
25 juin 2006 de BOSTANCI à ERDEK
« Des passagers inattendus ! »
Nous avons pris le Muezzin de court, rien que pour le faire bisquer… et pourtant il a avancé son appel matinal.
4h15 : Une longue étape de 81 milles nous attend, et il convient de détacher (c’est bien le terme tant le bateau est sanglé de toutes parts) Logos avant la mise en route des premiers ferries. Avant, arrière, Logos est libéré et quitte cette halte un peu agitée mais tellement sympathique.
Pas d’arrêt prévu aux îles aux Princes, objectif Erdek, petit port de pêche recommandé de la rive asiatique.
5h40 : Le soleil se lève et nous croisons nos premiers cargos que nous avions un peu oubliés. De jeunes dauphins viennent folâtrer autour de Logos, rapidement rappelés à l’ordre par leur mère.
Tout à coup, à 40 milles de toute côte, un vol étrange autour de Logos, vol plus nerveux que celui des mouettes… deux pigeons voyageurs… Logos continue sa course, lorsque l’un des pigeons réapparaît et se pose sur le pont, épuisé, le bec entrouvert. Il est bagué et semble perdu, d’où vient-il ? Où va-t-il ? Qu’est devenu son compagnon ?... un peu d’eau approchée avec la gaffe, quelques grains de riz complet lancés doucement pour ne pas effrayer notre hôte. Chacun observe l’autre, nous, curieux devant ce bel oiseau au plumage de belles couleurs, lui, inquiet mais heureux de cette collation.
Le vent s’est levé, il est temps de faire taire Perkins qui ronronne depuis notre départ, au risque d’effrayer notre passager. Quelques manœuvres pour lancer le Génois… pas de réaction. Notre petit ami s’est perché sur le panier de pêcheur qui trône à l’avant et semble apprécier la situation. Et pourquoi pas le Spi qui nous permettrait de mieux profiter d’Éole. Toujours aucune réaction. Nous sommes un peu déçus lorsque notre passager prend son envol. Sans doute a-t-il retrouvé assez de forces pour continuer ? Eh bien pas du tout. À notre grande stupéfaction, il revient quelques minutes après avec son compagnon… sorti de nulle part et semble l’inviter à prendre place sur Logos, tandis que lui-même retrouve avec satisfaction son perchoir.
C’est ainsi que nous voyageons avec deux passagers à plumes, nullement dérangés par nos manœuvres.
18h30 : Nous approchons de la côte, le Spi est rangé, la grand’voile est ferlée. C’est avec deux étranges figures de proue guettant la terre et leurs repères que nous pénétrons dans la baie d’Erdek accueillis par les mouettes.
Un battement d’ailes autour de Logos comme pour dire au revoir, nos deux compagnons s’élèvent dans la ciel, repartis pour leur longue course. D’où venaient-ils ? Où allaient-ils ? Une belle rencontre.
Le port d’Erkek est devant nous avec de nombreux chalutiers, mais bien vite un signe nous réconforte en nous indiquant un appontement… nos amarres sont prises (j’aime beaucoup… !), reprise de mouillage pour longueur de chaîne insuffisante, est-ce à cause des mouvements du ferry ? Nous sommes placés, il ne nous reste plus qu’à profiter de notre soirée dans ce lieu plein de sérénité et d’authenticité.
26 juin 2006 ERDEK
« Baigneuses masquées ! »
Dès le matin, Erdek se révèle être un port de pêche plein de vie. De nombreuses mouettes piaillent autour des chalutiers de retour de leur pêche matinale, spectacle très breton et peut-être la promesse de beaux poissons pour le repas.
Le guide des plaisanciers signale une criée… effectivement un espace clos avec gradins semble destiné à la vente de poissons le matin à 8h30… nous y viendrons en badauds demain.
Devant le port un vendeur ambulant propose des dorades dans une étrange boite en fer… 30 liras… trop cher à notre bourse.
Un peu de lèche vitrine en « ville »… les tenues estivales sont à l’honneur, et pour les élégantes musulmanes qui craindraient le soleil et les regards… une étrange combinaison de baignade est proposée. Avis aux amateurs, cela existe !!!… Intégrisme où vas-tu te nicher ?
27 juin 2006 ERDEK
« De l’intérêt de savoir compter !»
8h15 : nous sommes prêts pour assister à la criée. Les gradins sont occupés par les habitués. Nous observons de l’extérieur, puis, timidement, nous nous glissons entre les acheteurs. En face de nous le « commissaire » chargé de la mise à prix, au sol, de nombreuses boites de métal fermées qui seront ouvertes à chaque enchère, chacune contenant le même poids de poisson (environ un kilo). C’est ainsi que sardines, rougets, dorades, maquereaux et loups trouveront preneur parmi les revendeurs, les restaurateurs ou les particuliers. Pierre s’enhardit à accepter une enchère pour une belle boite de rougets. Un acheteur surenchérit. Pierre abandonne. Dernière boite, les acheteurs se regardent et nous laissent l’enchère. Vraiment gentils! Deux succulents repas en perspective, une expérience sympathique et le sentiment d’avoir fait une bonne affaire en constatant que les revendeurs multipliaient le prix d’achat par trois !!!
28 juin 2006 d’ERDEK à CANAKKALE
« Un spi dans les Dardanelles! »
Il nous faut sérieusement penser à notre sortie de Turquie, notre année de transit log s’achevant. Il est temps de redescendre sur Canakkale pour faire notre « check out ».
Le premier ferry et les ronrons des barques de pêche ont animé le port. Nous quittons cette belle escale. Il est 6h30 et une longue journée de navigation nous attend.
Jusqu’à l’embouchure des Dardanelles où nous retrouvons nos tankers familiers, les allures se succèdent selon l’influence des îles. Du vent, plus de vent… lancer le génois, enrouler le génois !!!
Nous quittons cette mer de « marbre » qui nous a semblé, par sa couleur gris vert, peu engageante pour la baignade, mais où grouille la vie aquatique : poissons, dauphins et dont les habitants nous ont témoigné beaucoup de gentillesse. Le vent du Nord et le courant nous poussent et, contrairement à l’aller, c’est la zone de courant maximum que nous choisissons, encadrés par les rails montant et descendant des tankers… Pierre a même choisi de gréer le Spi pour permettre à Logos de battre des records de vitesse : 7, 8 et plus de 9 nœuds… Spectacle sûrement étrange que ce voilier ainsi gréé descendant le détroit, encadré par ces géants flottants.
Heureusement pour moi, le trafic est relativement peu intense et les rails éloignés de notre trajectoire…
18h30 : Nous appontons à la marina de Canakkale.
29 juin 2006 CANAKKALE
« 100 dollars économisés pour la St. Pierre !»
Il nous faut effectuer notre sortie de Turquie et rendre visite aux différentes autorités compétentes : police, douane, harbour master après avoir rejeté la proposition d’un « agent » proposant ses services pour 100 dollars… proposition alléchante, il se dit en effet tellement de choses sur les formalités à accomplir… mais 100 dollars, cela vaut peut-être le coup de perdre un peu de temps et de patience.
Résultat : une heure de visite à trois bureaux différents, un thé offert, beaucoup d’amabilité et les tampons de rigueur sur notre transit log et nos passeports.
Promenade dans les rues de Canakkale et découverte d’un atelier de sculpture. Rien à vendre ? Dommage !
Logos va maintenant quitter la Turquie pour une virée en Grèce.
30 juin 2006 de CANAKKALE à LIMNOS (Ormos Moudhros)
« Logos va finir par se faire flasher !»
Nous sommes déjà en route pour 60 milles lorsque le soleil se lève au dessus de la rive asiatique. Logos s’est positionné en plein milieu du détroit et, malgré l’absence de vent, un tout petit ronron de Perkins suffit à le propulser rapidement. N’ayant plus l’appréhension de l’inconnu, nous avons tout le temps d’admirer l’immense mausolée « Aux soldats tombés » qui se dresse en bout de la presqu’île de Gélibolu, une sorte d’Acropole moderne à la mémoire de tous ces soldats tués dont la moitié étaient des turcs défendant leur pays, réconciliés dans la mort « Il n’y a pas de différence entre les Johnny et les Mehmet… » (Atatûrk).
Nous avons retrouvé la mer Égée et apprécions une bonne baignade.
Le vent s’est gentiment levé et nous permet d’envoyer le génois tout en continuant à bénéficier d’un agréable courant porteur. Les cargos disparaissent peu à peu. Nous voici seuls.
Limnos est en vue, île aux formes arrondies, et apparemment dénudée. C’est dans une vaste baie abritée que nous jetons l’ancre, cette même baie où étaient ancrés 200 navires de guerre, dont un certains nombre de navires-hôpitaux des forces alliées en 1915, peu conscients, au départ, de la présence des mines flottantes qui allaient détruire 4 d’entre eux et du nombre de blessés à soigner ou évacuer.
On peut se demander ce que venaient faire dans cette galère, australiens néo-zélandais… et français. Aujourd’hui, à part un petit cargo semblant en garder l’entrée et une barque de pêche, c’est un vaste plan d’eau vide qui s’offre à nous. Rien de très pittoresque, mais la journée a été longue et il nous tarde de retrouver les plaisirs de la patauge.
Première vraie récolte d’oursins (6 dz.) arrosée de Résiné.
Soirée paisible et douce nuit.
1er juillet 2006 LIMNOS « Ormos Moudhros »
« L’île sans hommes !»
Limnos, belle île en forme de papillon, offrant de vastes baies protégées, autrefois étape incontournable entre l’Asie et l’Europe pour les bateaux marchands, semble être tombée dans l’oubli et avoir été mise à l’écart des routes commerciales et, pour l’instant aussi, des circuits touristiques. Ses forêts ont été dévastées, son habitat détruit par les tremblements de terre.
Faut-il dans son histoire trouver la source de cette misère ? Limnos, où une histoire de représailles successives :
* Héphaïstos ici exilé de l’Olympe par son père Zeus parce qu’il s’était permis de lui reprocher son inconduite …
* Les femmes de l’île, condamnées par Aphrodite à faire fuir leurs maris par l’odeur qu’elles dégageaient pour avoir refusé de la servir, en sympathie pour ce même infortuné Héphaïstos…
* Les maris assassinés par leurs épouses dédaignées…
* Limnos une île qui se serait vidée de tout habitant si Jason et ses Argonautes n’y avaient fait une halte bénéfique !!!
Beaucoup de beauté dans ce dénuement. Un goéland a adopté notre annexe et, perché sur un boudin, observe ses congénères.
Un voilier britannique s’est discrètement ancré à l’entrée, un peu près des rochers… mais tout est tellement paisible… une brume légère recouvre peu à peu le paysage. Un calme olympien !!!
2 juillet 2006 LIMNOS – Moudhros
« Colère de Zeus ! »
Toujours avoir à l’esprit que nous sommes en Grèce et que les dieux de l’Olympe ont l’esprit querelleur.
3h15 : un coup de semonce, Éole se met à souffler… 30, 40 nœuds. Pierre lâche un peu de chaîne pour accroître notre poids de mouillage. Zeus, pour ne pas être en reste, zèbre le ciel d’éclairs tout en faisant donner le tonnerre... Pierre mouille une autre chaîne pour faire prise de terre (en mer)… Ça tonne, ça flashe à tout va, tandis que des trombes d’eau se déversent sur Logos… Seul Poséidon semble être resté en dehors de la bagarre, la mer est calme !
Comme nous, notre voisin a éclairé tout son voilier, lui aussi en alerte.
Sur l’écran de l’ordinateur Logos reste imperturbable, mais que le jour tarde à se lever pour nous permettre de rejoindre le port principal de l’île.
Au lever du jour, notre voisin vient très aimablement s’enquérir de notre état et nous proposer de le suivre dans un petit port voisin qu’il connaît bien , plus sécurisé que le grand port et de nous placer à couple de son bateau.
Une anse peu profonde, un chenal marqué de bouées, une toute petite entrée de 10 mètres de large qu’il faut aborder avec soin. Bill est là pour nous accueillir et nous aider à apponter derrière lui, le port étant désert.
Visite de courtoisie des Coast-guards… rien ne presse pour les formalités… nous les auraient-ils changés depuis notre dernière venue en Grèce en 2004 ? Une bonne sieste après cette nuit un peu perturbée, nous aviserons après.
Bill à bord d’un Dufour 40 est un navigateur solitaire, terriblement communicatif dans un superbe anglais de Chester… good for me, I’ll brush up my English. (Me to dixit Pierre)
3 juillet 2006 LIMNOS « Moudhros harbour »
« Un car pour Mirina ! »
Une sonnerie de clairon… cela change du muezzin et nous rappelle que Limnos, située à l’entrée des Dardanelles, si près du territoire turque, était une importante base militaire grecque. Une présence armée semble moins s’imposer maintenant… mais la planque doit être bonne.
9 heures : un car pour Mirina, capitale de l’île où Jean a expédié notre courrier. 30 Km à travers champs et villages épars, avec de très belles vues sur la mer et les collines, pour 2,5 euros chacun.
Notre courrier est arrivé après un voyage de 10 jours !!! Nous pouvons profiter sereinement de notre visite.
Mirina, capitale et unique centre touristique, est animée en ce jour où le vent a quelque peu détourné les baigneurs de leurs plaisirs au profit d’une petite séance de shopping. Beaucoup de boutiques de souvenirs, des cafés mais peu de restaurants.
Sur le port dominé par une citadelle, les pêcheurs s’activent à préparer leurs filets. Un beau spectacle, de même que la montée en haut de la citadelle par un petit chemin pentu et le panorama découvert depuis le sommet.
Un petit resto cantine en attendant l’heure de notre car… peu de choix, mais des saveurs agréables et un tout petit prix.
Le port s’est enrichi d’un autre voilier, un beau Ketch Vauquier du nom de « Bégonia » avec à bord un sympathique couple de français… plus facile pour les échanges d’informations techniques.
« Logos », « Spindrift »et « Bégonia » … un beau trio que la météo, la coupe du monde de football et la sympathie vont réunir pendant 4 jours.
Aucune visite des Coast-guards, nous faisons maintenant partie de leur paysage familier et avons même réussi à nous brancher eau et électricité… confort très rare en Grèce.
Apéritif à bord de « Bégonia ».
4, 5 et 6 juillet 2006 LIMNOS « Moudhros Harbour »
« Le vent souffle, nous aussi ! »
Trois jours passés à simplement laisser filer les heures en compagnie de Clotilde, Yves et Bill… Les calamars et la friture d’un élégant restaurant du port sont très appréciés, de même que les confortables fauteuils de son salon où nous avons pu nous caler pour suivre avec grand intérêt le match France-Portugal…
7 juillet et 8 juillet 2006 LIMNOS Ormos Pavlou.
« Un vrai bijou! »
Chacun va reprendre sa route, « Bégonia » monte sur Istanbul, « Spindrift » descend sur Lesbos poussé par le vent et Logos va expérimenter une autre baie de Limnos sur la côte ouest … Un vrai bijou dans un paysage de rêve où nous attendent de magnifiques oursins, assurément surpris de leur succès. Lever et coucher de soleil éclairent les collines environnantes de belles couleurs.
9 juillet 2006 de LIMNOS à EVSTRATIOS
«Une coupe perdue sur un air de bouzouki! »
Nous quittons notre petit paradis, provision d’oursins faite, pour une courte étape de 20 milles jusqu’à un gros caillou qui se détache très vite dans la brume. C’est Perkins qui nous approche de cette grosse masse où, à la jumelle, on ne distingue aucune trace de vie, à part une antenne au sommet d’une montagne. Heureusement que l’écran nous confirme la présence d’un petit port et nous guide vers cette échancrure à l’ouest dominée par un ensemble blanc (en fait un cimetière où ont dû être enterrés les victimes du tremblement de terre de 1968).
Un enrochement, un long quai où nous appontons Logos, non loin d’un grand ferry, face au village. Quelques maisons délabrées portent encore les stigmates du tremblement de terre, mais la vie semble avoir pris le dessus et de coquettes maisons aux volets peints de bleu ou vert témoignent d’une renaissance.
Une fois de plus, beaucoup de courtoisie des habitants rencontrés et des coast-guards.
Quelques prunes récoltées pendant notre promenade dans le village très fleuri. Des tables sont dressées sur une esplanade jouxtant l’unique restaurant pour un mariage Peut-être que l’ambiance sera un peu bruyante, mais nous serons les bienvenus pour regarder la finale de la coupe du monde et nous joindre aux convives.
Nous nous contenterons de pâtisseries grecques et d’ouzo offerts… Un peu dépités (comme les grecs qui préféraient la France) par l’issue du match et, peu enclins à profiter de l’orchestre « bouzouki » pour cause de départ matinal pour l’archipel des Sporades Nord, nous rentrons à bord.
10 et 11 juillet 2006 d’EVSTRATIOS à PELAGOS (Ormos Paignou)
« Un futur marin ! »
6h30 : le ferry a eu beau se faire très discret, nous lui emboîtons rapidement le pas pour rejoindre notre prochaine escale dans l’île de Pélagos, à une distance de 50 milles.
Le vent est de la partie : ½ heure de moteur, 8h30 de voile grand largue, une vitesse de 7 à 9 noeuds et, à l’arrivée, une vaste baie offrant plusieurs ancrages. Une belle crique aux eaux turquoise, bordée de rochers blancs qui nous rappelle certains mouillages turcs est encore déserte, deux bouts à terre, voilà « Logos » ancré, salué par les nombreuses cigales.
Un voilier « famille » avec à son bord Baptiste, tout juste 3 mois !!! s’est ancré non loin de nous et bénéficie d’une initiation « oursins » devant un verre de résiné offert. Plaisir de certaines rencontres.
Un vent un peu musclé en soirée nous oblige à « barrer » la crique pour éviter toute velléité de rapprochement des rochers… de toute façon personne ne pouvait s’enfoncer plus avant vers la petite plage.
12 juillet 2006 de PELAGOS à PERISTERA
« De crique en baie ! »
Une flottille de 9 bateaux est venue s’ancrer à l’entrée de notre crique simplement pour une heure ou deux… plaisirs des ébats dans l’eau, mais aussi impatience de notre part, l’un d’entre eux ayant mouillé sur notre ancre nous privant de notre liberté.
15 heures, nous sommes libres.
13 milles parcourus à la voile avec la descente du long couloir entre Alonnissos et Péristera. Plusieurs voiles blanches se promènent à la surface de l’eau, les Sporades Nord, chapelet d’îles semées sur la mer et proches du continent étant un lieu prisé des plaisanciers.
Une très belle baie au Sud « Kira Panagia » où nous retrouvons « Harriette », voilier britannique rencontré à Lesbos. Chacun va sa route, parfois les chemins se croisent, Jo et Mike connaissent les îles et nous donnent quelques conseils quant aux mouillages éventuels. Deux maisons de pêcheurs, un troupeau de chèvres, deux petites plages et des pentes couvertes de maquis et d’oliviers. Deux autres voiliers se balancent sagement au mouillage.
13 et 14 Juillet 2006 PERISTERA sud
« Feu de camp inconscient ! »
Une journée de grand calme, comme si la baie n’appartenait qu’à nous, puis l’arrivée d’une flotille Sunsail… Se méfier dès qu’un voilier approche avec un grand fanion (chef de flotille)… même s’il est seul. 9 à 10 bateaux vont le rejoindre… Si le chef est efficace, tout ce beau monde est rapidement casé dans le minimum de place, sinon c’est l’anarchie. Ici nous avions affaire au genre efficace avec des équipages britanniques « famille » donc ambiance assez sympa. Mais qu’elle tristesse lorsque nous les avons vu allumer un gigantesque feu sur la plage. Comment peut-on être responsable et méconnaître les méfaits du vent qui propage très vite quelques brindilles enflammées prêtes à embraser la montagne ?
Ce soir là, le vent resta sage…
15 et 16 juillet 2006 De PERISTERI à ALONNISSOS « Patitiri »
« Un taxi pour l’ascension! »
Traversée du chenal au moteur, histoire de recharger un peu nos batteries, il ne faut pas compter sur une connexion électrique, même en payant… Heureusement que nos panneaux solaires sont performants! Pas de ferry à l’horizon, ni de phoques d’ailleurs… Aucun rapport bien sûr, mais le secteur étant dit "zone protégée" pour cette espèce… certains ont la chance d’en apercevoir un.
Un petit quai près de la plage, recommandé par « Harriette » nous semble en effet préférable au grand quai de ville où nous pourrions être déplacés par les « propriétaires » des lieux.
A part la position des anneaux d’amarrage et la hauteur du quai… c’est top. L’eau est limpide, ce qui, pour un port, est surprenant et quelques baigneurs s’ébattent non loin de Logos.
Nous sommes dans un lieu très touristique avec de nombreux hôtels qui dominent la baie et un grand nombre de restaurants. Il nous faut prendre un taxi pour monter sur Hora, la vieille ville, bien abritée sur les hauteurs des attaques pirates (par cette chaleur, Pierre ne se sent pas le courage d’affronter les 3,5Km à pied… moi non plus d’ailleurs). Nous nous contenterons de la redescente vers le port… 1,7Km par une plaisante venelle pavée, accompagnés par le chant des cigales, actives dragueuses. Après le tremblement de terre de 1965, les toits de lauze ont été remplacés par des toits de tuile, les façades et les balcons sont peints de frais. Tout est très fleuri et les gigantesques bougainvilliers qui escaladent les façades nous font penser à notre malheureuse potée qui a bien du mal à supporter l’air marin de St. Cyprien.
Curieuse rencontre avec ce chien portant fièrement de belles lunettes de soleil. Les femelles du quartier doivent en frémir d’envie.
Un gros yacht, « Pamina », a apponté non loin de nous. Débauche de lumière ! Amortir en étant vu… très people !
Toujours pas de réclamation des Coast-Guards qui ne montrent le bout du nez qu’à l’arrivée des ferries de l’autre côté du quai où nous avons apponté. Une tentative pour avoir de l’eau auprès d’un responsable d’un petit ferry hydroglisseur se solde par un échec… colère rentrée lorsque nous constatons qu’il lave à grande eau son engin dans une île où l’eau est dite rare.
Donc pas d’eau, pas d’électricité mais un bel appontement gratuit… agréable au moment de notre passage. Nous apprendrons ultérieurement que, à ce même quai, la semaine suivante, les passagers des voiliers avaient été obligés de coucher à l’hôtel tant le ressac malmenait les bateaux et les passagers.
Un petit tour en autocar pour avoir un aperçu des paysages de cette île avec, pour terminus, une escale prisée par les flottilles de voiliers de location « Sténi Vala »… Un minuscule quai devant deux restaurants, un « market ». « Harriette » est là comme posé sur l’eau transparente. Un site très pittoresque mais qui, à nos yeux, ne justifiait pas d’y passer 4 heures en attendant le bus suivant. Quelques photos, quelques mots échangés avec Mike et Jo et nous voici repartis avec le même bus pour Patitiri.
17 juillet 2006 ALONNISSOS : de Patitiri à Mourtia
« Coup de roulis ! »
Une pause au Sud d’Alonnissos dans une vaste baie très ouverte offrant plusieurs ancrages avant de rejoindre Skopélos. Notre choix se porte sur une belle paroi rocheuse à laquelle Pierre attache nos deux bouts à terre… apparemment un mouillage insolite mais très beau, si tous les ferries passant au large n’y avaient généré une longue houle… pas de danger certes mais un certain inconfort après plusieurs heures !!!
18 juillet 2006 d’ALONNISSOS à SKOPELOS « Agnondas »
« Une crique en port ! »
Descente le long de la côte Sud-Est de Skopelos, espérant y trouver un mouillage plaisant. La mer est formée et le vent irrégulier nous fait alterner moteur et voile. La côte est belle avec ses falaises rouges, recouvertes de pins. Une belle baie est annoncée par notre guide : la baie de Stafilos, prince minoen dont la tombe et ses richesses viennent d’être découvertes. Quelle déception, une lèpre couleur feu a dévasté tout un flanc de montagne ne laissant derrière elle que désolation. Un feu allumé sur la plage, une rafale de vent et toute une colline embrasée. Quelle inconscience et, pour nous, un spectacle si désolant que nous préférons poursuivre notre chemin vers le Sud jusqu’à une vaste baie nous rappelant nos mouillages turcs en eau profonde, dans une crique boisée. Une légère hésitation, le vent ayant forci, et l’invitation d’une étroite faille dans la côte, entrée d’un tout petit port, abri pour plaisanciers et pêcheurs, escale des ferries de Skopelos lorsque la force du vent du Nord rend l’accès au port principal dangereux. Pour tout port, un long quai de béton, une esplanade pour l’accueil des ferries avec au fond une plage et sur l’autre côté une belle côte rocheuse où nous trouverons de beaux oursins.
Un voilier se déhale, nous prenons sa place et sommes bientôt rejoints par « Harriette »… Toujours ces routes qui font que l’on se croise plusieurs fois avant que les chemins ne se séparent.
Soirée tortilla et vin d’Espagne avec Mike et Jo sur Harriette.
19 juillet 2006 SKOPELOS « Agnondas »
« Beau Kastro… sans Kastro ! »
9h15 : Nous sommes prêts pour explorer Skopelos en bus. Tout d’abord, direction la capitale « Skopelos » par une très belle route de montagne très boisée qui redescend dans une vallée fertile d’oliviers, vigne, amandiers et pruniers en traversant de coquets villages. Nous avons un peu l’impression d’avoir retrouvé notre « dolmus » turc, le conducteur du car semblant s’arrêter à la demande.
Skopelos nous apparaît d’abord comme un vaste port dans une baie naturelle protégée par une haute falaise… mais voilà, ce jour là, la mer passe par-dessus la digue, éclaboussant les voiliers amarrés et rendant toute sortie du port très hasardeuse… comme toutes les fois où le vent du Nord est quelque peu nerveux… c'est-à-dire souvent dans ces îles réputées « ventées ».
Un bord de mer assez touristique mais avec une certaine élégance et, devant nous, le spectacle de la vieille ville construite en amphithéâtre au dessus du cap, une invite à gravir ses escaliers dallés jusqu’au Kastro réduit aujourd’hui à deux pans de murs annexés par un café. Une lente montée gratifiée d’un magnifique panorama sur la mer. C’est un plaisir que de serpenter dans ces ruelles pentues pour admirer de discrètes chapelles et de belles maisons chaulées aux balcons de bois. Certaines ont pu préserver leur ancien toit de lauzes, d’autres ont dû les remplacer par des toits de tuile, un peu plus clinquants.
12 heures : nouveau bus pour un autre port, « Loutraki » et surtout « Glossa », autre vieux village perché au dessus de la mer pour éviter les attaques de pirates, ce qui n’a pas vraiment empêché le trop célèbre Barberousse de faire massacrer tous les habitants de cette île en 1538, qui, elle, ne doit pas son repeuplement aux Argonautes mais aux émigrants.
Une belle heure de promenade entre pins, oliviers avec de très belles échappées sur l’archipel voisin de l’île de Skiatos.
Arrêt « Glossa », charmant village plein de pittoresque et de couleurs. Deux petites chaises bleues nous tendent les bras : slouvakis(brochettes), ouzo pour un prix infiniment moindre que ceux pratiqués en front de mer.
Une église enfin ouverte où règne une ambiance joyeuse, et l’image amusante du pope en train d’astiquer le « retable » perché sur son échelle, avec l’aide de quelques fidèles.
Une venelle dallée, puis un chemin entre amandiers et pruniers (un peu de maraude en passant…) nous permet de redescendre agréablement sur Loutraki, lieu assez peu festif à nos yyeux.
Agnondas s’est rempli en notre absence, cause de vent un peu nerveux et manque d’abris. Pour gagner de la place chacun se met à l’ancre, perpendiculaire au quai, pour mieux partager ce havre.
20 juillet 2006 SKOPELOS « Agondas »
« Stand bye !»
Vent, rafales nerveuses, personne ne se risque dehors. Journée d’attente et de réflexion … et si nous profitions de cette halte prolongée pour aller visiter les Météores… Ferry jusqu’au port de Volos sur le continent, puis location de voiture… En une journée cela peut se faire à condition de prendre le ferry rapide de 6h30.
Sitôt dit, sitôt fait, les billets sont pris sur le « Flying Dolphin » pour le lendemain. Le taxi est commandé pour 6 heures - possibilité de téléphoner ¾ d’heure avant l’horaire pour s’assurer du départ et de son lieu. Un coup d’œil au guide et la préparation du pique nique. Nous sommes prêts.
21 juillet 2006 SKOPELOS « AGNONDAS »
« Faux départ »
Rafales de vent au réveil… mauvais signe. Appels téléphoniques répétés… le bureau des Hellenic Seaways ne répond pas. Étonnant ? Pas vraiment mais une certaine rancune lorsque nous apprenons à Skopelos que, devant l’état de la mer, le capitaine a annulé le départ. Pourquoi pas échanger les billets pour le lendemain. Solution envisageable, nous n’en serons quitte que pour un nouveau réveil à 5 heures !
Faisant contre mauvaise fortune, bon cœur, nous nous réjouissons de la beauté du lever de soleil sur la vieille ville qui peu à peu embrase les façades des maisons, en attendant le premier car pour Agnondas.
Dans le petit port, les bateaux s’agitent un peu : moteur un peu nerveux de certains yachts, chaînes mal mouillées de voileux inexpérimentés. Pierre participe à l’accueil des nouveaux arrivants.
22 juillet 2006 SKOPELOS « Agnondas »
« Nous n’irons pas à Volos !»
Nouveau réveil à 5 heures. Gusty coléreux n’a pas attendu la sonnerie pour nous tirer de notre torpeur et c’est peu convaincus que nous nous préparons… à aller nous faire rembourser... Bien entendu, un téléphone muet … et pour cause, le bureau soit disant opérationnel dès 5h45 n’ouvrira qu’à 6h35 !!! (Est-il besoin de rappeler que nous sommes en Grèce !!!) pour nous annoncer un départ à nouveau annulé… un Dauphin Volant… ça n’existe pas, ça n’existe pas… le prof de bio aurait du se méfier ! Nous n’irons donc pas à Volos et nous consolons en admirant un nouveau lever de soleil sur la ville. Si une fenêtre météo se dessine, nous poursuivrons notre route.
« Harriette » prolonge sa pause… un nouveau cours de conversation anglais/anglais pour Pierre.
23 juillet 2006 de SKOPELOS à SKIROS « Ormos Pevki »
« Eau tonique ! »
Nous avons guetté les habituelles rafales coléreuses de 4 heures du matin… Silence total ! C’est le moment.
6h30 : déhalage dont les manœuvres ne dérangent même pas un pêcheur solitaire installé à côté de Logos… attraction magique du bouchon à surveiller !
Direction Skiros, île des Sporades Nord un peu à l’écart, surnommée « Anemossa » (ventée) distante de 38Milles.
38Milles de bon pré dans une mer formée. Plus de 7N de moyenne. De quoi satisfaire un skipper pro… qui ne craint pas les flashs… ici !!! !
Skiros, encore un beau papillon posé sur les flots avec une côte Nord verdoyante, une côte Sud dénudée et, au milieu, une haute falaise. Est-ce de cette falaise que le roi Lycodéme a précipité Thésée ?
Il est vrai que la beauté un peu sauvage de cette île décrite comme « battue par les vents et les flots » ne se laisse guère apprivoiser et n’offre au navigateur que des mouillages hasardeux, sauf bien sûr par grand calme. Après une halte repas près d’une belle côte de rochers blancs, sous une carrière de marbre apparemment endormie, nous optons pour une baie plus accueillante et jetons l’ancre non loin d’un petit minuscule petit port pour barcasses… tout en assurant notre poupe à un corps mort inoccupé… ainsi Éole pourra souffler d’où bon lui semblera.
Il fait toujours frisquet avec une eau dite tonique : 22°.
24 juillet 2006 SKIROS : d’Ormos Pevki à Ormos Linaria.
« Linaria de loin ! »
Effectivement le vent a tourné pendant la nuit et Logos se retrouve comme amarré à côté de petites barques… spectacle sans doute assez insolite depuis la côte !
Et voilà Meltem qui s’excite dès le matin : 18N, 20N… Prometteur. Plan sioux pour nous détacher sans heurter de barques, ni prendre le corps mort dans l’hélice… cool, cool.
Une petite sueur froide pour moi, effacée par une belle navigation le long de la côte avec un passage très peu profond entre l’île et l’îlet Valaxa : 10, 8, 5 mètres… toujours flippant mais avec l’espoir de trouver un appontement convenable à Linaria, seul port de l’île pour effectuer notre rituelle visite terrestre.
Notre déception fut grande de découvrir qu’à part un grand quai pour les ferries, interdit aux plaisanciers, les seules places possibles étaient annexées par deux grands chalutiers.
Ce n’est donc que de loin que nous apercevrons ces belles constructions cubiques sans toit, semblables à celles des Cyclades, un peu déçus de devoir renoncer à la visite de cette île.
Au Nord, une baie près d’une longue plage. Deux voiliers sont déjà au mouillage.
25 juillet 2006 de SKIROS à la côte turque « Kirkdilim Limani »
« Complètement larguée ! »
Une longue journée d’attente et de questionnements… partir dès ce soir? Plusieurs météos consultées et peut-être un créneau !! 110 milles à parcourir avant de trouver un abri, cela mérite réflexion.
Gusty s’énerve sans trêve, la mer est de plus en plus froide et pourtant cette baie est si belle avec ces îlots qui semblent la fermer du large et font le bonheur des pêcheurs.
17h45. C’est décidé, nous partons, espérant que le calme de la nuit sera propice à notre longue navigation. La soirée est prometteuse, le soleil couchant teinte de magenta la côte que nous longeons au doux ron ron de Perkins. Par sécurité, la Grand voile est hissée avec deux ris, le Génois remplace Perkins et Logos commence à affronter une mer confuse dont les vagues se bousculent et se bousculeront une bonne partie de la nuit, battant les flancs de Logos qui vaillamment les repoussera jusqu’à l’attaque suivante.
Le vent s’oriente au largue, moi je suis complètement « larguée »aussi, laissant Pierre et le pilote assurer et parcourir 80 milles à vive allure tout en appréciant les beaux effets de vagues et le firmament !!!
Ce n’est qu’à l’abri de la côte sud de Khios que je pourrai prendre le relais et permettre un tout petit peu de repos au skipper. Rencontre des premiers pêcheurs, surveillance des flotteurs de filets de pêche et des tankers dont nous croisons à nouveau la route.
Direction la Turquie où nous espérons pouvoir faire une pause.
26 juillet 2006 KIRKDILIM LIMANI
« Sans une ride mais frisquette! »
Une grande baie bordée de hautes falaises, une tonne au milieu pour amarrer un gros bateau et tout au fond, invisible de la pleine mer, une profonde échancrure où nous jetons l’ancre avec plaisir, tout heureux de retrouver, trois ans après, cette belle crique qui nous avait déjà abrités. Toujours aussi belle, elle n’a pas pris une ride … elle ! Tout y est : beauté de la côte rocheuse, plage, oliveraies qui témoignent d’une ancienne occupation…une eau émeraude mais toujours un peu fraîche… rien que de très normal lorsque nous découvrirons une source près du rivage… mais guère supportable pour les apnées profondes.
Deux sacs à oursins vivement remplis… à cette température on ne musarde pas… mais les oursins les plus beaux que nous ayons vus depuis longtemps et encore surpris d’avoir été dérangés.
Un autre voilier français est venu partager notre petit paradis avec beaucoup de discrétion.
« Manifango » et « Logos » sympathisent et la soirée se termine en compagnie d’Evelyne et Jean-Claude devant apéritif et pâtes au saumon à bord de leur voilier.
27 juillet 2006 KIRKDILIM LIMANI
« Attention tapette ! »
Journée paisible dans ce petit paradis où, étrangement, il n’y a aucun signe de vie terrestre, même pas des biquettes en promenade. Seules d’agaçantes petites mouches semblent y avoir trouvé refuge, excitées par la présence de visiteurs. Exercice de tapette et de nombreux cadavres !
Une visite à la plage, espérant y trouver quelque trésor apporté par les flots. Seuls de très beaux galets aux belles couleurs rempliront le bateau.
Depuis notre arrivée, un bruit insolite attire notre attention, comme si, dans une faille de la côte, un tempétueux torrent se déversait. Une belle promenade avec Facétieuse à la recherche du dit torrent. En fait simplement le bruit du ressac sur les rochers et la découverte d’une échancrure magnifique aux eaux cristallines où se prélassait toute une colonie d’oursins… un peu décimée aujourd’hui !!!
28 juillet 2006 de KIRKDILIM À KIRKDILIM
« Sigacik ! Aie, aie, aie !»
Une ombre à ce paradis maritime… pas de connexion possible et nous commençons à nous sentir isolés, n’ayant pas pu donner de nouvelles, ni en recevoir, depuis plus de quatre jours. Peut-être l’occasion de découvrir le port de Sigacik que nous avions shunté en 2003.
Le coup de vent du matin et la houle qui avaient réussi à nous atteindre dans notre retraite s’étant calmés, le signal du départ pour la baie voisine est donné.
13 milles à parcourir. Difficile d’établir une toile, le vent tournant dans la baie. C’est donc au moteur que nous doublons le cap tandis que Pierre se hâte de récupérer mails, météos et de rassurer sur notre sort. Nous remontons maintenant vers le Nord et de nombreux moutons sont de bien mauvaise augure… Logos ralentit sa progression, 5 puis 4 nœuds, le vent se renforce, 20, 25, 28 nœuds, ce n’est pas la peine d’insister. Cap au sud et retour à la case départ.
Le baro baisse, Meltem hurle, mais les fonds marins et les oursins sont toujours aussi beaux.
Pierre inspecte les environs de Logos et remonte à bord un short et un bandana, rien à voir avec la magnifique serviette de bain remontée il y a trois ans, mais la preuve que, même au paradis, les coups de vent peuvent être nerveux.
Un peu de romantisme sous un magnifique firmament, même la voie lactée, souvent masquée par les lumières, se fait admirer.
29 juillet 2006 : KIRKDILIM
« Catabatique de partout !»
Gusty fait colère sur colère. Il hurle, hurle, puis fait semblant de se taire, mais c’est pour mieux reprendre son souffle. Pas de crainte pour notre ancrage, 70 mètres de chaîne en plein milieu de la crique, cela fait du poids à opposer au vent qui est plus hurleur que très fort.
Mais que se passe-t-il dehors ? Aucun plaisancier ne vient partager notre Eden. Sont-ils tous à l’abri en marina ?
En allant vérifier l’ancre, Pierre découvre une superbe étoile de mer, comme nous n’en avions jamais vu. Ce sera mon petit cadeau du jour. Certes elle perdra un peu sa couleur brune en séchant, mais quelle belle pièce !
Le plan d’eau s’est agité. D’émeraude il est devenu turquoise. Soirée d’attente en écoutant la plainte d’Éole.
30 juillet 2006 : de KIRKDILIM À KUSADASI
« Réveillés par le silence !»
2 heures du matin, grand silence prolongé ! Après 33 heures de hurlements, cela peut surprendre et nous réveiller dans notre sommeil en nous laissant espérer une accalmie propice au départ.
7 heures. En route pour la marina de Kusadasi située à 35 milles, avec l’espoir d’un vent mieux orienté. Pour ne pas nous laisser de regrets, notre golfe émeraude s’est vêtu de gris. Sans doute a-t-il lui aussi souffert de la maltraitance de Meltem.
Logos trace sa route au plus vite pour épargner sa passagère. Vent de travers, puis largue, puis absence de vent et le plaisir d’admirer le spectacle de nombreux chalutiers suivis d’envolées de mouettes.
Les buildings de Kusadasi apparaissent à l’horizon, sorte de Manhattan sur la côte turque. Rien de très pittoresque, mais la perspective d’une belle marina à l’accueil soigné et d’une pause terrestre bienvenue.
Nous avons d’ailleurs vraiment dû être balancés depuis plusieurs jours car le mal de terre se fait cruellement sentir jusqu’à en devenir à peine supportable dans les bureaux de la marina.
Sortis de Turquie à Cannakale, un nouveau transit log annuel nous est nécessaire, ce qui nous permettra d’apprécier les formalités de plus en plus simplifiées grâce aux services de « l’agent » de la marina et ce pour 25€ y compris une visite « trombine » au bureau de la police en taxi gratuit. Nous sommes loin des 80€ demandés à Cannakale.
Nous voici donc en règle avec les autorités turques.
« Manifango » se repose à un ponton voisin, ce qui nous permet de faire plus ample connaissance et de passer une sympathique soirée à bord de Logos. À côté de lui, une curieuse embarcation !
31 juillet 2006 KUSADASI
« L’île aux oiseaux !»
Réveillés par les « roucoulades » d’un couple d’hirondelles perché sur une des écoutes du génois… un spectacle amusant de voir combien « Monsieur » se donne du mal pour séduire sa dulcinée tandis que « Madame » lisse ses plumes… pas étonnant en cette station balnéaire dont le nom signifie « île aux oiseaux » !!!
Le soleil darde déjà de ses rayons. Ça plombe, ça plombe.
Journée lessive, écritures et préparation de nos visites de demain aux sites archéologiques voisins : Priène et Millet, avec un petit détour par Éphèse.
La fraîcheur de la soirée nous enhardit à marcher jusqu’au « Bazar ». Des cuirs, des tapis, des restaurants, mais plus de vendeurs que de clients. Heureusement que, presque quotidiennement, de grands paquebots déversent leurs milliers de passagers pour la visite d’Ephèse… mais ont-ils le temps de flâner dans le « Bazar » ?
1er août 2006 KUSADASI
« Éphèse et Gold Center ! »
Départ pour Éphèse en Fiat climatisée. Une large route est en construction, mais cette fois ci les travaux ne bloqueront pas notre progression. Étonnant d’imaginer le réseau routier que la Turquie va bientôt offrir.
Un scénario prévu : arrivée en bas du site, une navette gratuite proposée pour rejoindre le haut … avec un détour par le Gold Center. Nous n’attendions que cela pour aller admirer leurs créations et remplacer le tour de cou que j’ai malencontreusement perdu. Toujours le même plaisir des yeux, tout particulièrement devant la vitrine de copies uniques de bijoux hittites (budget dissuasif !). N’ayant pu réassortir mon bracelet à un tour de cou existant, c’est avec une nouvelle parure plus moderne que nous quitterons l’antre de la tentation pour le site archéologique d’Éphèse.
Presque seuls il y a trois ans, c’est dans une marée humaine (nos touristes du paquebot de Kusadasi) que nous commençons notre visite. Heureusement que nous avions eu tout le temps de nous attarder devant ces splendides monuments, cela nous permet de presser le pas pour ne revoir que l’essentiel dont la bibliothèque de Celsius toujours aussi grandiose. Lors de notre dernière visite un vaste hall clos et couvert témoignait de travaux d’archéologie. Aujourd’hui ce hall est ouvert au public pour un supplément de 5€ et offre au regard cinq maisons romaines avec péristyle, atrium et bains, dont les fresques des murs et les mosaïques du sol témoignent encore de la splendeur passée. Une visite rare que nous pouvons recommander au visiteur individuel.
Pique-nique au frais dans la voiture avant de mettre le cap au sud pour découvrir Priène que nous avions délaissé en 2003, ayant un programme trop chargé.
Une route à travers collines et champs nous permettant de renouer avec cette Turquie champêtre que nous aimons. Une haute falaise. C’est là que la ville antique de Priène s’est établie il y a 2400 ans, mais, à l’époque, Priène était un port grec et la cité dominait la mer aujourd’hui retirée à 15Km de par les facéties alluvionnaires du fleuve Méandre. Construite par le célèbre architecte Hippodamos selon un plan digne des grandes villes américaines, c'est-à-dire avec des rues à angle droit, comme adossée à une falaise protectrice, Priène se réduit essentiellement à un vaste théâtre dont les sièges de marbre des notables sont encore préservés, avec en son milieu l’autel de Dyonisos et à un acropole dont le temple dédié à Athéna ne dresse plus vers le ciel que cinq colonnes, les autres fûts crénelés jonchant le sol prêts à être redressés (en attente de budget).
C’est à Milet que nous achevons cette journée culturelle. Milet ou Miletto, elle fut aussi une cité maritime d’Asie Mineure imporplantée au beau milieu des champs d’oliviers et des cultures sur une vaste plaine alluviale. Son imposant théâtre s’offre au regard de très loin, comme une sorte de forteresse surgie des brumes et tient ses promesses lorsque nous le visitons. Le théâtre le plus imposant et sans doute le mieux conservé de toute la Turquie avec celui d’Aspendos. 15000 spectateurs pouvaient y prendre place.
De jeunes étudiantes en archéologie effectuent des fouilles pour retrouver des traces de l’ancien port près de l’entrée du stade… des perspectives d’étude sûrement très motivantes.
Si Éphèse était envahi par les touristes de toute nationalité, c’est pratiquement seuls que nous avons effectué ces deux visites… ne suscitant la curiosité que de quelques touristes turcs.
Une halte « fraîcheurs » à un de ces petits stands que les paysans turcs établissent le long des routes pour vendre leur production, un complément avitaillement dans une zone commerciale très style « Créteil Soleil », tristement annonciatrice de ce que pourrait devenir la Turquie !!!
Nous avons parcourus 170Km, un record « inférieur » battu !
2 et 3 août 2006 de KUSADASI à SAMOS « Ormos Possidonion »
« Du croissant blanc à la croix blanche !»
Nous allons poursuivre notre lente descente vers Marmaris entre Grèce et Turquie au gré des vents et des mouillages abrités. Deux heures de Grand Voile et Génois, quelque fois assistés du moteur, et puis le grand calme dans le chenal entre la côte turque et Samos tellement proche que l’on dirait une même terre.
L’ormos Possidonion nous avait déjà procuré un abri, sans prétention mais plein de charme et de vie authentique. Quelques maisons de vacances, quelques barques de pêche pour le plaisir et un superbe Ketch britannique déjà ancré, un bien beau coup d’œil dans cette baie.L’eau est maintenant à 25°C, beaucoup plus agréable pour la patauge mais sans doute moins favorable au développement des oursins.
Nous nous entraînons au Rummiscube, très célèbre en Turquie sous le nom de Okey, en prévision de futures parties avec Arthur.
4 août 2006 SAMOS de Possidonion à Pythagorion
« 2x2=4! »
Un tout petit vent nous pousse dans le chenal, juste assez pour gonfler le génois et propulser (un bien grand mot !) Logos à la vitesse de 3N !! Bien peu pour mon skipper qui aurait préféré
sortir la grande toile, mais se mettre en batterie pour si peu fait réfléchir. La marina en "construction" en 2003 est maintenant achevée et semble un bon spot pour laisser un bateau quelques jours.
Pour aujourd’hui, heureux de nous frotter un peu au monde et de bénéficier de l’animation d’un petit port, c’est dans la cité de Pythagore que nous appontons. Une honorable vieille dame en bois répondant au doux nom de « Couronne de Marie » vient se placer à côté de Logos. L’un à 20 ans, l’autre 73 ans. Si elle pouvait nous raconter son histoire !
Sous le buste de Pythagore, inventeur aussi de la table de multiplication, la soirée se termine très agréablement par le concert donné par une chorale de Samos dont voix et instrumentistes font preuve d’une musicalité et d’un enthousiasme très communicatifs.