Mise à jour : 2015
___ Les carnets de bord de Martine___

spi


Carnet de bord 2002

Croatie, de Pula à Sibenik en 2002


Venise, le 5 août, 6 heures :

Joyeux anniversaire Laurence

Réveil féérique. Logos quitte son mouillage hors du commun alors que le soleil se lève sur Venise couvrant d’or et de bistre le Grand canal. Vision magique avant le départ pour 12 heures de navigation avant de retrouver Pula. Peu à peu le petit vent prometteur du matin s’apaise. C’est donc avec « Pépère » que nous parcourerons 70 milles avec, tout au long du parcours, au lointain, le spectacle d’autres voiliers et quelques ferries. Pierre bricole, Martine tricote et commence la garde robe « Mantine » de Garance.

18 heures. Nous appontons à ACI PULA qui nous est familière à côté d’un beau voilier mené par un sympathique couple australien qui s’empresse de nous donner leur documentation sur 3 marinas grecques.

Atmosphère lourde.

Mardi 6 août Pula

Il fait toujours aussi lourd. Le ciel s’est chargé et nous avons juste le temps de faire un abondant marché avant qu’une forte pluie ne tombe. Tant mieux ! Les tee shirts lavés seront rincés deux fois.

Notre journal de bord Venise a pris forme, illustré par de belles photographies. Il est prêt à partir par la poste avant que nous ne reprenions notre vie vagabonde, de mouillage forain en mouillage forain. Pula a fait son grand plein de touristes depuis notre précédent passage. Il faut, maintenant, se faufiler.

Mercredi 7 août Pula Unije (Vognisca)

Le ciel n’a pas encore repris son air serein mais nous allons tenter notre chance ailleurs et aviserons si le vent se lève. En fait, il ne s’est pas levé pendant notre navigation et nous a permis d’admirer tranquillement de magnifiques formations nuageuses dignes de peintres inspirés et de nous abriter dans une vaste anse d’Unije, île recouverte de maquis aux côtes basses et rocheuses. Les orages ont tourné autour de nous comme chassés par la paix qui se dégage de ce site.

Belle pêche aux oursins et une magnifique figure de proue pour Logos : un énorme bois flotté en forme de tête de bélier ! Une autre pêche inattendue celle là : pas une chaussure comme de coutume mais 4 !!! Oui ! Deux paires complètes, sans doute tombées d’un bateau. Du 39 et du 41…

Jeudi 8 août D’UNIJE à LOSINJ (côte sud Vela Draga)

Une matinée farniente comme on en vit quelques unes en crique. Peu à peu le mouillage s’est chargé en voiliers. Il est grand temps de poursuivre notre chemin.

Pierre ne résiste pas à l’appel du spi qui va nous propulser gentiment le long de Losinj. Certes, il faut être vigilant mais l’élégance du spi mérite ce petit effort.

Un beau mouillage dans une petite crique un peu ouverte mais séduisante. Il nous est difficile, malgré l’heure un peu tardive de résister à une petite promenade le long de la côte rocheuse dans une belle eau émeraude. De beaux oursins coulent des jours heureux dans de longues failles… ils ont de la chance, nous ne sommes venus qu’en promeneurs.

Peu à peu le ciel se charge. Couleurs et formes sont magnifiques et sollicitent l’œil du photographe.

Malheureusement une telle beauté n’est pas sans revers et la nuit pourrait être difficile. Entre l’ancre et un bout à terre, nous sommes tenus mais il faut être en alerte.

Vendredi 9 août de Losinj à Silba

Les orages qui semblaient se préparer hier soir commencent à éclater à l’horizon. Tout est gris, ciel et mer ne font qu’un. C’est très beau mais très inquiétant. Heureux oursins que nous n’irons pas déranger, préférant trouver un abri plus favorable et nous éloigner de cette zone menaçante.

Pas de jeux de voile, sauf un peu de génois pour rester manoeuvrant tandis que Pierre enregistre les grondements du tonnerre… Ensuite, c’est Pépère qui nous propulse rapidement vers le mouillage choisi. Spectacle étonnant que de voir tous ces bateaux se diriger rapidement dans des directions très variées, tels des fourmis dérangées par un coup de pied dans la fourmilière. En fait chacun cherche son abri. Les nuages s’accumulent, l’orage s’étale. Nous le fuyons mais les nuages noirs s’amoncellent au-dessus de nous. Nous jetons l’ancre face au petit port de Silba où nous sommes rejoints par Louisette et André Pitel avec Vicky, jolie petite Westie blanche. Le plan d’eau est un peu agité. « ALPASSO », petite vedette Oyester 22 sera plus à l’abri de l’autre côté de la digue. Soirée à bord de Logos.


Samedi 10 août de SILBA à MOLAT (Uvala Zapuntel)

Baromètre en baisse, ciel chargé. Nous sommes en pleine dépression météorologique car le cœur est toujours au sourire, surtout après cette photo magique envoyée par Augustin que nous venons de découvrir au courrier. Que cela fait chaud au cœur ! Qu’ils sont beaux tous deux auprès de cette belle poupée.

Grand-voile et génois nous mènent vers notre prochaine escale. Logos doit lutter contre vent de sud-est et vagues, ce qui rend notre progression plus lente. ALPASSO a mis les gaz pour rejoindre au plus vite un mouillage paisible.

Uvala Zapuntel : belle anse au nord de Molat, face à l’île d’Ist, équipée de bouées qui permettent un amarrage sécurisant par ce temps.

Alpasso a trouvé un refuge idyllique dans un recoin rocheux, bien ficelé dans une eau émeraude.

Une très belle promenade dans l’île jusqu’au village de Zapuntel. De confortables maisons aux jardins soignés : fleurs, fruitiers, figuiers prometteurs… quelques prunes goûtées au passage. Soirée au restaurant du port : spaghettis aux fruits de mer non congelés, calmars au gril, gelatti, avec vue sur Logos qui dresse fièrement son mat éclairé.

Le retour en annexe est un peu frisquet… la pluie nous semble bien froide.

Le baromètre chute toujours.

Dimanche 11 août : Molat Zaqpuntel Molat Jazi

Qu’il nous a semblé doux d’être bien amarrés pendant cette longue nuit où les orages se sont succédés sans relâche.

994 au baromètre… Nous ne sommes jamais descendus aussi bas. Certes, le spectacle offert par le ciel est grandiose mais parfois bien sinistre aussi. Un vrai son et lumières.

Nous décidons avec ALPASSO d’aller prendre un mouillage dans l’anse du village de Molat Jazi où il pourra trouver un refuge le moins remuant possible. (Ah ces bateaux à moteur sans quille !!!). La mer s’est levée mais le refuge n’est qu’à 5 milles.

Jazi, une vraie anse très pittoresque. Un paysage presque champêtre avec le clocher ocre du village dominant un premier plan très boisé. Un premier mouillage nous permettra d’aller à la recherche d’éventuels oursins absents de ces jolis fonds de rochers entrecoupés de longs sillons de sable, quelques buccins pour l’apéro mais surtout, combien plus exceptionnel : de beaux morceaux d’amphore recouverts de concrétions.

Encore un orage impressionnant avec un éclair photographié. Le dîner à bord d’ALPASSO sera bien arrosé … de pluie aussi.

Lundi 12 août : de Molat à Kornat Siprate

Nos plantations ont été encore bien arrosées cette nuit. Une journée où le ciel et la mer se confondent dans la même grisaille s’annonce. ALPASSO dont la nuit a été bien remuante décide de rejoindre Zadar.

Le bulletin météorologique étant alarmiste, nous allons nous-même regagner un abri de sud-est.

Finalement le temps nous a offert une longue journée de navigation, beaucoup plus agréable que prévu : 7 heures de voile au pré serré sur une mer à peine formée.

Nous retrouvons Logos en fringant coursier filant ses 7 à 8 nœuds.

Certes le temps est un peu frais pour la saison mais nous allons pouvoir atteindre notre objectif : un mouillage plein de romantisme dans l’archipel des Kornati avec un crépuscule à contempler du haut de l’île ces monts arrondis et pelés dans la lumière du soir.

Calme, quiétude de courte durée. L’orage du soir, aussi puissant qu’imprévisible, déverse ses torrents de pluie, ses éclairs et ses tornades qui nous obligent à surveiller les tractions du bateau sur sa chaîne d’ancre … à l’aide de l’écran de l’ordinateur.

Mardi 13 Août : Kornati : de Siprate à Lunga

Du chahut de la nuit, il ne reste plus rien, à part la grand-voile qui continue de goûter un peu. Les rochers pelés des Kornati se détachent sur un ciel pur. La température de l’eau est descendue à 23°… après avoir connu 29° !!! Mais la baignade matinale est bien agréable et pleine de surprises. Plusieurs moules géantes ont été arrachées par le ragage des chaînes d’ancre et sont éparpillées sur le fond.

Cette fois-ci, lente descente des Kornati sous voiles. Un petit vent de SW tire gentiment Logos le long de ces îles pelées où les abondantes averses récentes ont fait reverdir quelques touffes d’herbe ou de buissons. Un très beau spectacle agrémenté par les petites taches blanches des voiles qui se promènent en tous sens.

Et, pour terminer cette belle journée Kornati, un très beau mouillage solitaire dans une échancrure de l’île Lunga, privilège très rare en cette période où il faut savoir partager.

Vu l’étroitesse de la crique, Logos se retrouve attaché en Y à la côte et nous pouvons, à la nage, aller prospecter le long de la côte rocheuse. De très beaux fonds, des oursins qui n’attendaient que nous et finiront leur vie dans de petits pots. Difficile de résister à la pose du filet, Pierre ayant repéré un banc de petits loups.


Mercredi 14 août : de Lunga à Tijat « Tijascica »

Cette nuit, le ciel a été sage. Pas de grondements, pas d’éclairs, une belle voûte étoilée prometteuse d’une journée agréable.

Première occupation dès le réveil : remonter le filet avant la visite d’éventuels bateaux. 8 poissons dont un petit loup, un beau rouget de roche et deux cigales de la petite espèce qui auront la vie sauve après avoir été photographiées et avoir pataugé dans l’évier. Visite à la nage du fond de la crique à la recherche de bois flottés. Collecte : 2 bois entrelacés qui pourraient finir en pied de lampe et une tête d’oiseau. Le retour le long de l’autre côte rocheuse est tout aussi beau, très coloré, plein de failles.

Les 15 milles qui nous séparent des approches de Sibenik seront parcourus par vent arrière, voiles croisées et à bonne allure grâce à Pierre, vigilant à la barre pour aider Logos à rester précis sur son cap, puis au près serré pour rejoindre le mouillage prévu sur Tijat, une vaste rade entourée d’une belle pinède où d’autres bateaux sont déjà au mouillage, ancrés mais sans se gêner étant donné l’espace. Quelques travaux de consolidation de l’attache d’une des lattes de la grand-voile. Deux voiliers à couple d’un groupe de jeunes italiens s’agitent un peu… Les voisins immédiats passeront une nuit agitée. Heureusement, nous sommes assez loin.

Jeudi 15 août : de Tijat à Skradin

Une belle remontée de la rivière Kraka sous une lumière du matin éclairant falaises et rives boisées, un nombre impressionnant de voiliers et embarcations de tout genre croisés. Ils descendent la rivière – cela devait être un bel embouteillage dans la petite rade de Skradin. Arrivée vers 12 heures dans ce petit décor d’opérette sous un beau soleil. Là nous retrouvons avec plaisir Louisette et, Dédé et Vicky, peut-être aussi le bar à vin d’Anka qui nous accueillera pour un jambon « Prosut », fromage arrosé de « Prosek » (raisins séchés sur pied ou sur paillons si le temps n’est pas favorable).

Une bonne sieste tandis que Louisette et Dédé feront la promenade cascade nous aidera à récupérer un peu.

Une belle promenade dans les jardins, de belles figues, des grenades.. ;

Soirée barbecue à bord de logos.

Vendredi 16 août : de Skradin à Sibenik

Une nuit un peu musicale, flonflons pour cause de 15 août mais un réveil dans un paysage toujours aussi surprenant. Ce petit village dont le clocher émerge, fait penser à un village autrichien. Ces roseaux évoquent quelque étang paisible.

Nos routes se séparent avec ALPASSO qui va regagner Vodice tandis que nous allons arpenter Sibenik pour avitaillement et courrier.

Le courrier est bien là, qui nous attend… Une bonne nouvelle malgré les factures diverses.

Cette arrivée rapide va nous permettre d’envisager la descente directe vers la Grèce en profitant d’une fenêtre météo favorable avec petits vents de secteur Nord prévus. Le plan d’eau de Sibenik est un peu agité mais le voisinage est sympathique : un très beau voilier de 20 mètres battant pavillon italien et skippé par un Croate « de notre age » aux yeux bleus pleins de vie … et de paysages. Nous finirons la soirée à bord de « AKU AKU » parcourant le monde tout en goûtant le rosé Croate, production de « Claude », un « senior » Croate pétillant comme son vin.

Samedi 17 août, dimanche 18 août, lundi 19 août : de Sibenik à Corfou, Grèce

La fenêtre météo semble se confirmer et favorise notre départ pour la Grèce sans escale soit 325 milles non stop avant de retrouver la terre ferme avec, cependant, deux pauses possibles si la fatigue se fait sentir ou si le temps se gâte : l’île de Vis en Croatie ou, plus loin, Brindisi en Italie.

Dernier avitaillement en fraîcheurs au marché de Sibenik dès « potronminet » par Pierre pendant que je range Logos.

8 heures : les amarres sont larguées. Après avoir fait le plein, il faut attendre la traversée du lac de Sibenik pour connaître l’orientation et la force du vent. Un peu de slalom entre les îles pour trouver notre cap. La mer est contrariée, croisée et ne sait comment s’orienter ballottant Logos comme une coquille de noix. Il en sera ainsi pendant une partie de la navigation, sauf aux heures privilégiées où le vent nous permet de hisser les voiles et de stabiliser le bateau : 2 heures sous génois et 8 heures sous spi. Dommage que la drisse de spi se soit rompue, nous aurions pu aller jusqu’à Corfou ainsi. La récupération du spi dans l’eau et de nuit nous a occupé un peu. Deux très beaux couchers de soleil… deux nuits étoilées, une grande solitude… une seule voile aperçue allant de Brindisi à Dubrovnik et quelques ferries longeant la côte pour remonter depuis la Grèce jusqu’à Venise (où nous les avions déjà rencontrés).

Le lever de soleil sur les montagnes qui longent la côte de l’Albanie est superbe et voudrait bien éclairer ce pays si isolé entre deux zones très touristiques. La côte Albanaise est belle, sauvage, abrupte et visiblement peu ou pas habitée. Une mer plate, couleur acier nous permet de longer tranquillement la côte est de Corfou (Kerkyra) malgré un court orage, d’apponter Logos dans la vaste marina de Gouvia après 56 heures de navigation (un peu moins de 6 nœuds de moyenne) et de prendre un peu de repos. Il est 16 heures. Nous allons pouvoir commencer à nous familiariser avec la Grèce.